Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 8, 1948.djvu/155

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Le Proviseur. — Quoi, de maintien ?… Qu’est-ce que ça veut dire ? Il est joli, le maintien !… Vous faites le facétieux avec moi, maintenant, espèce d’imbécile !

Le Garçon. — Qu’est-ce qu’il y a ?

Le Proviseur, descendant légèrement. — Si les garçons de salle s’entendent avec les maîtres d’études pour…

Chandel. — Je vous jure, monsieur le Proviseur.

Le Proviseur. — Et puis, en voilà assez ! Vous n’avez plus rien à faire ici !… Veuillez vous retirer et aller m’attendre dans mon bureau !

Chandel, pincé. — C’est bien, monsieur le Proviseur. (Il passe au-dessus de lui et en remontant va donner dans Robin, le faisant pirouetter.) Ah ! toi !… (Il est arrivé à la hauteur des tables devant lesquelles sont assis les élèves ; aux élèves :) Eh bien ! vous êtes contents, vous autres, vous êtes contents ! Oh ! mais vous me le paierez. (Il leur montre le poing.)

Le Proviseur. — C’est bien, pas d’histoires, allez !

Chandel. — Oui, monsieur le Proviseur ! (Aux élèves.) Vous me le paierez !

Il sort furieux.

Le Proviseur, au garçon qui est entré et est resté un peu au-dessus de la porte. — Et puis qu’est-ce que vous voulez ? Qu’est-ce que vous venez faire ?

Le Garçon. — Monsieur, il y a là monsieur le Duc… le Duc.. Je ne me rappelle plus de quoi, ambassadeur d’Orcanie, avec la duchesse et toute une suite.

Serge. — L’ambassadeur !

Le Proviseur. — Ah ! Sapristi !… dans mon indignation j’avais complètement oublié le but de ma venue. (A Serge qui se lève aussitôt.) Monseigneur… préparez-vous !… c’est vous que ces messieurs viennent chercher.

Serge. — Moi ?

Le Proviseur. — Une grande nouvelle dont j’ai été précisément avisé par lettre tout à l’heure. Sire, le roi Yvan, votre auguste père, désirant prendre un juste repos, vient d’abdiquer en votre faveur. Sire, vous êtes Roi !

Serge, grimpant sur le banc. — Je suis Roi !

Chopinet et Kirschbaum. — Vive le Roi !

Le Proviseur. — Je suis heureux d’être le premier à annoncer cette bonne nouvelle à Votre Majesté.

Serge, très ému. — Oh ! merci, monsieur le proviseur, merci ! (Aux autres.) Ah ! mes amis ! mes amis ! je suis Roi ! chouette ! c’est la fête.

Le Garçon. — Que dois-je aller dire ?

Le Proviseur. — Rien, rien ! J’y vais moi-même. (A Robin.) Venez petit, je vous emmène !

Robin. — No ! I will stay here to fetch that ladder.

Le Proviseur, le prenant par la main. — Je vous dis de venir, je ne vous demande pas vos réflexions.

Robin, résistant et tapant du pied. — But no !… you dont understand ! I say : I’ll stop here to fetch the ladder !…

Le Proviseur. — Ah ! à la fin, viendrez-vous ! quand je vous le dis.

Il le tire brusquement ce qui l’envoie dans la cour.

Robin, furieux. — Aoh vache !…

Il se sauve à toutes jambes et disparaît par l’escalier.