Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 8, 1948.djvu/191

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Stanislas. — Quoi ?

Arnold. — Les sacs.

Stanislas. — Eh bien ! c’est bon, je m’en fiche.

Arnold, à part. — Eh bien ! alors, pourquoi qui m’le demande ?

Stanislas. — A quelle heure avez-vous reçu ma dépêche ?

Arnold, les sacs toujours à la main. — Quelle dépêche ?

Stanislas. -… où je vous dis de nous attendre, que nous arrivons cette nuit ?

Arnold. — Je n’ai pas reçu de dépêche.

Stanislas. — Comment, vous n’avez pas reçu de dépêche ? Alors qu’est-ce que vous faites ici ?… Comment se fait-il que nous vous trouvions là à nous attendre ?…..

Arnold, interloqué. — Comment il se fait que…

Stanislas. — Oui.

Arnold. — Oui, oui j’entends bien.

Stanislas. — Vous n’avez pas pu deviner que nous arrivions.

Arnold. — Evidemment, non… non !… J’attendais ; par intuition.

Stanislas, à gauche de la table. — Il est fou !… Et ce souper… ce souper à deux couverts, est-ce aussi par intuition ?

Arnold, à droite de la table et au-dessus. — Ah ! non !… non, ça, je vais dire à Monsieur, j’ai rêvé comme ça que Monsieur et Madame allaient revenir, alors, n’est-ce pas, j’ai… j’ai préparé cet en-cas… en cas… qu’en cas…

Stanislas, — Eh ! bien, vous pouvez vous vanter d’avoir la double vue !… Il est même très bien servi, ce souper ; regarde donc, Sabine !

Sabine, qui est remontée près d’eux pendant ce qui précède. — Oh ! en effet ! et la jolie corbeille !

Arnold, redescendant un peu à droite. — Aïe !…

Stanislas, avec conviction. — Sont-elles belles, ces fleurs ! C’est à croire qu’elles sont fausses !…

Sabine. — C’est vrai. (Elle les touche.) Oh ! mais… elles sont fausses !

Stanislas. — Hein ?

Sabine, prenant le chapeau en main. — Ah ! c’est un chapeau.

Stanislas. — Un chapeau ?

Arnold, descendant près du bureau. — Pincé !… (Affectant de rire.) Ah ! ah ! ah ! oui…

Stanislas. — Délicieux !… Et ces fleurs, regardez-moi ça, sont-elles belles !… On jurerait qu’elles sont vraies !

Sabine, ravie. — Je l’emporte.

Elle se dirige vers la porte droite, en passant au-dessus de la table bureau.

Arnold, à part. — Ca y est ! Raflé, le chapeau à la cocotte.

Stanislas. — Tu ne veux pas manger quelque chose ?

Sabine, à droite du bureau. — Non, je n’ai pas faim ! Ce que je prendrais avec plaisir, c’est un bain !

Arnold, dressant l’oreille. — Hein ?

Stanislas. — Un bain ?

Sabine. — Oui, je sens que cela me délasserait tout à fait.

Elle sort.

Stanislas. — Un bain ! Madame veut prendre un bain !… Vite, allons préparer le bain…

Arnold, vivement, s’élançant entre Stanislas et la porte. — Non.