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Follentin, à la collégienne. — Attendez ! je ne veux pas permettre… Laissez-moi vous rembourser.

La Collégienne. — Mais jamais de la vie !

Follentin. — Mais si ! mais si !

La Collégienne. — Mais non ! mais non !

Follentin. — Ah ! c’est d’un XXIe siècle !… (Chant militaire en sourdine.) Qu’est-ce que c’est que ça ? Oh ! des soldats !

La Collégienne. — Sapristi ! Le peloton que je commande ! Quelle heure est-il ?

Follentin. — Cinq heures.

La Collégienne. — Cinq heures ! Nom d’un chien ! L’heure du service, et moi qui ne suis pas en tenue !… Ah ? bien, je suis bien !


Chœur

De cinq à sept !
De cinq à sept !
Chaque jour, six mois, c’est bien net,
C’est le service obligatoire,
De cinq à sept !
De cinq à sept !
De cinq à sept ! la sale histoire,
Il faut trimer comme soldat
Pour le service de l’État.

Sur la fin du chœur, ont paru deux pelotons : l’un de soldats hommes, l’autre de soldats femmes.

La Collégienne, en sergent. — Halte ! Rassemblement (L’arrêt se fait net.) — Là, regardez-moi ces cosaques Il faut que ça s’arrête ensemble ! Combien de fois faut-il que je vous répète que je veux entendre chaque pas séparément.

Follentin. — C’est vos soldats, alors, ça ?

La Collégienne. — Oui ! peloton des hommes ! peloton des femmes !

Follentin. — Oh ! oui, pelotons des femmes

La Collégienne. — Comment ?

Follentin. — Rien ! C’est une réflexion.

La Collégienne. — Ce que vous voyez là, C’est les célibataires ! Quant aux gens mariés, ils forment un peloton à part. Seulement il est toujours en retard, celui-là !… Allons, le peloton marié, là, grouillez-vous !

Paraît un troisième peloton composé de gens mariés.

Tous Ceux du Peloton Marié. — Voilà, Sergent, voilà !

Follentin. — Alors, c’est ça, l’armée d’aujourd’hui ?

La Collégienne. — Eh ! bien, oui, puisque — c’est le service obligatoire pour tout le monde, hommes, femmes, chacun y passe !

Parmi les mariés, deux s’embrassent.

La Collégienne. — Allons ! les nouveaux mariés ! Vous pouvez bien attendre sept heures, ! Et vous, le soldat du premier peloton, avez-vous fini de faire de l’œil à la petite de la troisième du deux ?…

Le Soldat. — Sergent ! J’en pince pour elle !