Page:Fiel - Armelle devant son vainqueur, paru dans l'Ouest-Éclair du 3 septembre au 10 octobre 1937.djvu/174

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de Saint-Armel, en levant les bras au ciel.

— Non, mademoiselle, je vous le laisserai, et…

— Je vous le laisserai ! Ceci est d’une impertinence invraisemblable ! Vous n’avez rien à me laisser, monsieur, rien n’est à vous, que je sache !

— Pardonnez ce lapsus… j’ai voulu insinuer que ce portrait me plaisait tellement que je voudrais le voir chez moi… mais, pas une minute, je n’ai songé à vous l’enlever.

— Ah ! j’ai ressenti une émotion terrible… je vous pardonne, monsieur. Sans un autre mot, sans un regard, sans un salut, Mlle de Saint-Armel sortit majestueusement de la pièce.

Elle retrouva sa nièce, penchée sur son ouvrage. À l’entrée de sa tance, elle leva le front :

— Qu’avez-vous, ma bonne tante ?

— J’ai… j’ai… que ce manant m’a mis l’esprit dans un état !

— Que s’est-il passé ? s’écria Armelle en se levant toute pâle.

— Ne t’alarme pas, ma chérie… Ah ! comme tu fais bien de ne pas vouloir te marier ! Les jeunes gens d’aujourd’hui sont des diables, qui n’ont peur de rien et qui ne savent pas ce qu’est le respect.

Armelle était plus tourmentée pour son amour que pour sa tante. Elle écouta cependant avec des airs qu’elle affectait de rendre affligés, la scène que lui relata la chère demoiselle.

En son for intérieur, elle pensait :

— Ce n’est que cela !

Tout haut, elle dit :

— Pourquoi vous être émue à ce point, chère tante, alors que ce monsieur a été enthousiasmé par la peinture, l’art de ce portrait… Nous possédons sans doute une merveille artis-