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Page:Fiel - Cinéma! Cinéma!, 1953.pdf/10

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CINÉMA !… CINÉMA !…

mement égal que des poissons extraordinaires s’agitassent au fond des mers ou que des fauves parcourussent les forêts. Jamais elle ne ferait leur connaissance et ce serait bien inutile à sa vie.

Claudine marchait d’un pas vif, parce que le mois d’octobre avait eu sa première gelée. Le ciel était clair et le soleil déjà pale. Mais le temps importait peu. Dans quelques moments, dans la salle tiède, la jeune fille oublierait toutes les contingences. Là, elle serait à l’aise, car ce qu’il lui fallait, c’était les intérieurs élégants dans lesquels évoluaient des femmes au chic suprême ; des messieurs leur baisaient la main d’un air respectueux, et des laquais en livrée venaient prendre leurs ordres.

Voilà qui était captivant.

Claudine s’assit à une place qu’elle jugea agréable. Il fallut que ses yeux s’accoutumassent à la demi-obscurité pour qu’elle distinguât ses voisins.

Devant elle, des jeunes filles en nombre ; un peu plus loin, des enfants. Naturellement, puisque c’était un dimanche, les parents se débarrassaient des petits encombrants en faveur d’une salle de spectacle.

Claudine reconnaissait quelques fillettes de son quartier, et elle se demandait, de bonne foi, quel plaisir ces enfants pouvaient trouver à ces tableaux. Sans doute n’y comprenaient-elles rien, et elles venaient pour être au chaud et « regarder les images ».

Quand Claudine s’était placée, elle n’avait pas de voisins directs. Quand l’obscurité fut donnée, elle comprit que l’on s’asseyait dans les fauteuils touchant le sien, mais elle ne distingua pas les occupants.

Le déroulement du film commença. Sur l’écran lumineux se projeta la vedette, une charmante femme dont la toilette plut infiniment à Claudine. Elle forma le projet d’avoir la pareille. Elle fit un calcul rapide. Avec ses appointements de 12 000 francs par mois, il lui était facile d’en distraire une dizaine de mille, avec un peu de temps, car elle payait sa pension dans