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l’élève bompel

épaule et je me suis dit : j’vas toujours le mener à la ménagère, une bonne soupe ne lui fera pas de mal, et après, je le reconduirai chez ses parents… Quand ma bourgeoise m’a vu entrer avec mon colis, elle a crié tout de suite : « Oh ! le bon petit ! que j’suis contente !

— T’es donc si contente, ma bourgeoise ? — Pour sûr ! bonjour, mon mignon… et le mioche a crânement répliqué : « Bonjour, ma bourgeoise ! » ce qui nous a bien fait rire… Mais, avant la soupe, pas moyen de lui tirer une indication. Ensuite, nous avons démêlé, à force de questions et de ruses, que môssieu ne voulait pas qu’on le conduise, qu’il s’était trompé de rue et qu’il avait un peu peur quand il m’a rencontré… Bref, je vous le ramène en bon état. »

Ainsi parla le brave homme, et Nil ajouta, pour que l’on ne crût pas à un désarroi profond :

— Papa… il faudra que tu m’achètes une montre pour que je sache l’heure de la soupe, quand je m’arrête pour regarder travailler.

Mme Bompel s’écria :

— Mais il ne faut jamais t’arrêter, mon chéri !

— Alors, je ne saurais rien ?

— Quand tu reviens du collège, il faut rentrer tout de suite. Si tu n’avais pas rencontré ce bon monsieur, nous te chercherions encore…

— Oh ! j’en aurais rencontré un autre ! répliqua Nil avec assurance… il y en a tellement dans la rue, mais j’aime mieux que ce soit lui, parce que « ma bourgeoise » a de la bonne soupe.

Ces paroles causèrent l’hilarité de tout le monde. Nil était si parfaitement naturel que ce qu’il exprimait gardait un cachet d’humour qu’on ne pouvait entendre sans rire.