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chaud, la joie de s’unir à Mathilde au printemps, le rendaient expansif. Il avait besoin d’un confident, et Gérard lui paraissait le seul qui pût ne pas être jaloux des jours futurs qui se préparaient pour lui.

— Tu as peut-être deviné mon bonheur ?

Dans une explosion de sentiments qui aboutissaient tous à une satisfaction intense, Germain raconta ses projets. Il épouserait Mathilde Bodrot et deviendrait patron. Sa mère était contente, son père plein de fierté ; la situation de la famille se consolidait.

— Il est vrai, ajouta Germain, que personne n’était ivrogne chez eux et que le travail les conduisait tous.

Gérard était soulagé d’apprendre ces choses. Il trouvait que tout s’arrangeait on ne peut mieux.

Un espoir plus fort l’étreignit, l’enveloppa, et il se sentit soudain soulevé par une énergie qu’il ne se connaissait pas. Une confiance illimitée en une justice le posséda. Tout vient à ceux qui travaillent opiniâtrement à atteindre un but équitable.


Le lendemain, le patron Bodrot dit à l’atelier :

— Il y a une nouvelle cliente qui désirerait que l’on allât chez elle pour examiner une serrure, afin de faire deux clés. Plit ou Manaut, arrangez-vous pour vous y rendre…

— C’est une serrure délicate ? demanda Plit.

— Je le crois.

— Quel est le nom de la dame ? hasarda Gérard.

Il n’aimait pas beaucoup s’introduire chez les nouveaux clients, craignant de se trouver en face d’anciennes relations.

Le patron Bodrot, croyant qu’il acceptait cette mission, lui donna l’adresse :

— Madame Alixin, place du Panthéon.

Plit dit :

— Je laisse cela à Manaut. Il a les mains plus fines que les miennes.

Bodrot était satisfait de l’accord qui régnait entre ses deux principaux ouvriers. Décidément, ce Plit était un bon garçon et il espérait que les accordailles officielles ne tarderaient pas entre Mathilde et lui.

Gérard partit pour la place du Panthéon.

— Je suis un serrurier envoyé par M.  Bodrot.

— Ah ! oui. Madame en a demandé un à l’ouvrière. Attendez ici, je vais prévenir Madame.

Gérard ne se doutait pas de ce qui allait lui arriver.

— Bonjour, jeune homme. Vous venez de la part de Mlle Bodrot ? Bon. J’ai un coffre dans ma chambre pour lequel il me faut deux clés. Venez avec moi.