se passa de lui. Jean de Mousterot « maistre des œuvres de maçonnerie du duc », et un tailleur de marbre de Namur, un certain Girard des Frères Mineurs, s’occupèrent de la structure architecturale du monument. Le sculpteur des figures fut un protégé d’Agnès de Bourgogne, sœur de Philippe le Bon ; il s’appelait Anthoniet ou Antoine le Moiturier ; il était digne des faveurs ducales et passait pour « le meilleur ouvrier d’imaigerie du royaulme de France. » La maçonnerie du tombeau fut érigée de l’année 1462 à l’année 1466 ; l’ensemble arrêté, Philippe le Bon examina le monument pour le corriger et l’amender ; le 5 juin 1470 on découvrit le sépulcre entièrement achevé.
Nous ne le décrirons pas avec autant de détails que celui de Philippe le Hardi dont il procède étroitement. Il est plus ouvragé mais d’un style moins noble. On y voit deux statues au lieu d’une. Aux pieds des gisants sont couchés deux lions et derrière les têtes du duc Jean et de sa femme quatre anges soutiennent le casque de Monseigneur et les armoiries de la duchesse. Au sujet des plourants, Courajod a fait les observations suivantes : « Un certain nombre de figures du tombeau de Philippe le Hardi ont été copiées très exactement par l’auteur du tombeau de Jean sans Peur : par exemple il y a deux moines avec la main dans le livre entr’ouvert, il y a deux chapiers presque absolument pareils ; il y a deux chartreux vus de profil, identiques ; il y a deux moines pleurants, la manche engagée dans le capuchon ; il y a deux figures avec le bras relevé derrière la tête » …[1] Ces ressemblances prouvent, sinon l’intervention, du moins l’influence de Claes Van de Werve. Les restaurations modernes sont plus audacieuses que dans le tombeau de Philippe le Hardi ; elles datent d’une époque funeste, au nom prédestiné ; on reconnaît dans ces statuettes du XIXe siècle un architecte et un sculpteur de Dijon. Sous leurs capuchons de pleureurs ils ont une physionomie et des coiffures modernes de la Restauration. L’architecte a une tête à la Berryer !
Ces petits personnages en capuchon ne sont pas rares aujourd’hui dans les musées et les collections. On les dit invariablement arrachés des tombeaux de Dijon, mais bien entendu les plourants de la Chartreuse se comptent. Ils se multiplièrent toutefois dès le XVe siècle. La mode des sépultures bourguignonnes se maintint pendant cent ans — et plus.
- ↑ Leçons. V. II. p. 379.