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suivi des productions de l’école dijonnaise, intervient comme un facteur très important dans les origines de la Renaissance italienne. En outre le Puits des Prophètes est pour lui le vrai point de départ de la Renaissance française. « C’est une œuvre qui inspira trois générations d’artistes et à laquelle nous devons l’initiative de notre grande sculpture des bords de la Loire ». M. de Laborde était même allé plus loin : « Notre statuaire moderne, disait-il, a son berceau à Dijon.[1] En effet Rude, l’auteur du Chant du Départ, est né dans la capitale bourguignonne et sans doute son génie héroïque s’est-il éveillé devant la lumière révélatrice des prophètes de Sluter. Et comme si le Destin avait voulu marquer que la sculpture, dans sa renaissance actuelle serait une suite de l’inoubliable imagerie du XIVe siècle, c’est à Valenciennes, patrie de Beauneveu, qu’il fit naître Carpeaux, le grand portraitiste du Second Empire, l’interprète si spirituellement dionysien de la Danse, l’évocateur passionné du Supplice d’Ugolin.

Nous ne pouvons quitter la Chartreuse de Champmol sans parler des peintures qui la décoraient et parmi lesquelles nous avons déjà cité le retable de Melchior Broederlam.

Le premier peintre de Philippe le Hardi fut Jean de Beaumetz[2]. Nous ignorons malheureusement tout de son style. Il habita d’abord Arras où il s’était marié ; il fut reçu bourgeois de Valenciennes en 1361 et la même année peignit et dora dans cette ville une image qui ornait la Halle des Jurés. En 1375 il résidait à Paris où Philippe le Hardi le prit à son service. Le maître fut bien traité, eut un valet, une bonne pension et de nombreuses gratifications. Il travailla successivement au château d’Argilly, à Montbar, à Dijon, visita Mehun-sur-Yèvre et Bruges. En 1388 il occupait dix-neuf ouvriers et les noms de ses élèves — Gérard de Nivelles, Torquin de Gand et autres — disent clairement leur origine. On sait que Jean de Beaumetz employa le vernis et l’huile, peignit force harnais de joute, panonceaux, bannières, et qu’il mourut en 1397. A-t-il exécuté des œuvres importantes ? C’est à supposer. Aucune malheureusement ne s’est conservée et le rôle de cet artiste dans l’évolution picturale nous échappe.

  1. Les Ducs de Bourgogne. T. I. p. 75.
  2. Cf. Kleinclausz. Sluter et la sculpt. bourguignonne. Dehaisnes. Histoire de l’Art, op. cit. nombreuses mentions.