Page:Fierens-Gevaert, La renaissance septentrionale - 1905.djvu/119

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

CHAPITRE VI


Les Débuts des Van Eyck

Jacques Coene, Haincelin de Haguenau, Jacquemart de Hesdin, Les Frères de Limbourg

L’éclatante apparition des Van Eyck semblait jusqu’en ces dernières années un phénomène miraculeux et inexplicable. Certes le génie est toujours un miracle, une énigme, mais il arrive qu’à défaut de la cause initiale on distingue plus ou moins nettement certains signes annonçant le prodige. On croit aujourd’hui connaître quelques-unes des sources qui alimentèrent l’art des Van Eyck. La production artistique des régions septentrionales était assez abondante et assez riche pour mériter leur venue ; le terrain était merveilleusement préparé ; on vivait dans une atmosphère de faste intense ; la fleur très rare pouvait naître ; elle était assurée de grandir. Le génie de Sluter à la fois humain et lyrique, naturaliste et religieux, se prolongeait dans l’imagination dramatique de Van de Werve Les peintres foisonnaient. Pourtant ni Sluter, ni Broederlam, ni Malouel ne sont les éducateurs des Van Eyck. Les affinités des Flamands de Bourgogne avec les deux illustres créateurs de la peinture moderne ne sont point d’une évidence frappante. On a cherché ailleurs et l’on a relevé chez quelques miniaturistes installés en France les signes d’une ascendance plus directe. Ces miniaturistes, novateurs décidés, sont tous flamands. Ils substituent des paysages aux fonds d’or encore employés par Malouel ; ils groupent, animent, campent, habillent — et même déshabillent — leurs personnages avec une intelligence de plus en plus complète de la réalité. Ces maîtres forment deux familles : l’une séjourne à Paris, l’autre a pour foyer Bourges, la capitale de Monseigneur Jehan de Berry.

À Paris deux noms sont particulièrement à retenir : Jacques Coene et Haincelin de Haguenau. Désigné dans un manuscrit sous le nom de