Page:Fierens-Gevaert, La renaissance septentrionale - 1905.djvu/170

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l’écuyer André de Tholonjon ; le seigneur de Mornay ; maître Gille d’Escournay, docteur en décrets et prévôt de Harlebeke. Jean Van Eyck n’est point cité parmi les membres de l’ambassade proprement dite. Le duc confie à l’occasion des missions spéciales et secrètes à l’artiste ; mais quand le maître est avec des gentilshommes, il reste au second rang malgré son génie. Les ambassadeurs, bien pourvus et fournis, s’embarquèrent le 9 octobre 1428 à l’Écluse, sur deux galères de Venise. Ils firent bientôt escale à Sandwich, pour y attendre deux autres galères qui venaient de Londres, remirent à la voile, s’arrêtèrent encore au port de la Chambre, à Pleume (Plymouth ?) Falemne (Falmouth ?) descendirent le 11 décembre à Bayonne en Galice, repartirent le 14 et prirent terre le 16 à Calscaës, à six lieues de Lisbonne où ils arrivèrent le 18 pour n’y faire qu’un séjour très bref. Le roi Jehan était à Estremoz, petite ville d’Alemtejo à dix lieues d’Evora et à trente-six de Lisbonne, avec Messieurs les Infants, Madame l’Infante, les seigneurs, chevaliers, écuyers, dames et demoiselles de la cour, réunis pour fêter l’arrivée de Madame Eléonor, Infante d’Aragon, épouse de l’Infant Edouard, « primogenit » du roi. Les ambassadeurs flamands envoyèrent des rois d’armes au souverain portugais pour annoncer l’objet de leur voyage et attendirent la réponse royale à Reols jusqu’au 12 janvier. Ils se rendirent alors à Avis où le roi les rejoignit et les reçut le lendemain matin, la messe entendue. Après le dîner il y eut une réception solennelle où Gille d’Escournay, le docteur en décrets, exposa à haute voix le désir de son seigneur, le très haut et très puissant comte de Flandre et duc de Bourgogne. Un docteur de Jean de Portugal répondit en latin, après quoi le roi commit à ses fils le soin de traiter les conditions du mariage. Les négociations durèrent plusieurs jours et « avec ce », dit textuellement le document de Bruxelles, «  les dits ambaxadeurs, par ung nommé maistre Jehan de Eyck, varlet chambre de M. D., seigneur de Bourgoingne et excellent maistre en art de painture, firent paindre bien au vif la figure de madite dame l’infante Elisabeth ; » — « al natural la figura de la dita dama infanta dona Isabel por un hombre Flamado maestre Juan de Yel (sic) moço de camara del dito musignor de Borgoigna, eçelente maestro en arte de pintura, » dit la version portugaise. C’est le seul passage du récit où le nom de Jean soit cité. Ces dispositions prises, les ambassadeurs firent sur la moralité de l’Infante une enquête qui donna de bons résultats, envoyèrent deux messagers à leur maître Philippe, l’un par terre, l’autre par mer et « aussi luy envoyèrent-ilz la figure delà dite dame faiete par painctre comme dit est.  » C’est la seconde fois qu’il est fait allusion à la présence de Jean Van Eyck.