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érigé dans le grand cloître de Champmol où s’étend à présent le potager de l’hospice.

L’école de Dijon est avant tout une grande école de sculpture. |e viens d’en citer les productions maîtresses : le Portail, le Puits de Moïse ou plus exactement le Puits des Prophètes, enfin les tombeaux de Philippe le Hardi et de Jean sans Peur. Trois grands noms sont inséparables de ces œuvres : ceux de Jean de Marville, de Claes Sluter et de Claes van de Werve. Le premier fonde l’école ; le second en est l’incarnation culminante ; le troisième, maintenant les conquêtes de son prédécesseur, établit pour un siècle le règne du style bourguignon en France. Avant d’analyser les œuvres, rassemblons ce que nous savons de leurs auteurs.

On n’est point fixé sur l’origine de Jean de Marville que les textes appellent aussi de Merreville, Mereville, Menreville, Menneville. On ne sait s’il est originaire du nord de la France, du pays de Liège, ou des confins de Luxembourg.[1] En tout cas il vient du nord ainsi que l’indique le prénom Hennequin que lui donnent les plus anciens comptes où il est mentionné. Il figure tout d’abord dans la grande pléiade d’imagiers réunis par Charles V, et Jean de Liège l’employa aux travaux de la sépulture royale élevée dans la cathédrale de Rouen. Après quoi il entre au service de Philippe le Hardi ; dès l’année 1373 il reçoit des gages comme maître imagier et valet de chambre de Monseigneur de Bourgogne et le tombeau du duc lui est commandé la même année. Aussitôt le sculpteur s’installe à Dijon. Divers travaux pour la maison ducale retardèrent l’exécution de la sépulture et celle-ci ne fut commencée qu’en 1383 ; dix ans seulement après la commande l’artiste alla chercher lui-même le marbre à Dinant et on le remboursa des frais de son voyage en 1384. Dès lors les comptes citent de nombreux ouvriers qui travaillent à ses côtés. Tous ont des noms flamands : Philipot van Erem, Gillequin Tailleleu, Liefvin de Hanc, Hennequin van Claire et enfin Claes Sluter, qu’il avait engagé comme ouvrier en 1381.

Il est indiscutable que certaines parties du tombeau de Philippe le Hardi étaient terminées quand Jean de Marville mourut en 1389 puisque peu de temps auparavant des ouvriers étaient venus de Paris pour le polissage du

  1. On hésite entre trois localités : Merville (nord), Mervil, hameau voisin de Saint-Trond, et Marville aux limites de la région luxembourgeoise. Cf. Dehaisnes op. cit., p. 510, et Courajod. Leçons. V. II. p. 126, 354 et 355.