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considérable. Selon MM. Grouvelle et Jaunez, elle consomme seulement 3 kilogrammes de bonne houille par force de cheval et par heure de travail dans les machines de la force de 8 à 12 ou 15 chevaux[1]. On sait, d’après les résultats obtenus, tant en Angleterre qu’en Belgique et en France, que la machine à basse pression de Watt brûle ordinairement de 6 à 7 kilogrammes par force de cheval produite et par heure de travail.

La machine de Wolf n’a reçu depuis sa création que des modifications de très-peu d’importance.

L’économie qui résulte de l’emploi de la machine de Wolf, la fit accepter assez généralement en Angleterre, malgré la faveur dont jouissait dans ce pays la machine primitive de Watt. Son succès fut plus complet et plus rapide en France, où le mécanicien Edwards, qui l’avait perfectionnée dans quelques détails de son mécanisme, en fit adopter l’usage. Aujourd’hui la machine de Wolf est extrêmement répandue dans le nord de la France ; les filatures l’emploient presque exclusivement en raison de la régularité extrême et de la douceur de son mouvement.

C’est vers l’année 1815 que les machines à haute pression, ou mieux les machines sans condenseur, commencèrent à s’introduire sérieusement dans l’industrie européenne. Nous n’avons pu parler jusqu’ici que d’une manière incomplète de ce genre de machines, dont les applications sont toutes modernes. C’est ici le lieu de les examiner avec plus de détails.

Avant de présenter l’historique de la découverte et des progrès de la machine à haute pression, nous commencerons par donner l’exposé des principes sur lesquels repose son mécanisme.

Dans la machine de Watt, ou machine à condenseur, on emploie de la vapeur chauffée seulement à la température de l’ébullition de l’eau, sous une pression qui ne dépasse pas de beaucoup celle de l’atmosphère. La condensation alternative de cette vapeur, sous les deux faces du piston, détermine un vide, qui permet à la vapeur de produire toute son action mécanique. Mais on peut aussi construire des machines réalisant de très-puissants effets, sans qu’il soit nécessaire d’y condenser la vapeur. Il suffit, pour obtenir ce résultat, de communiquer à la vapeur une tension supérieure à celle de l’atmosphère[2]. En effet, si le piston est pressé sur ses deux faces par de la vapeur dont la force élastique dépasse de beaucoup la pression de l’atmosphère, il suffira de chasser dans l’air la vapeur qui se trouve au-dessous du piston, pour que celui-ci s’abaisse aussitôt dans le cylindre. Quand le cylindre est rempli de vapeur d’eau présentant une force élastique supérieure à celle de l’atmosphère, et que ses deux capacités, supérieure et inférieure, communiquent entre elles, le piston est soumis sur ses deux faces à la même pression ; il reste donc immobile. Mais si tout d’un coup on vient à donner issue à la vapeur qui remplissait, par exemple, la capacité inférieure du cylindre, en ouvrant un robinet qui la fasse écouler dans l’air, la pression qui s’exerce sur la tête du piston, n’étant plus exactement contre-balancée au-dessous, précipite nécessairement le piston jusqu’au bas de sa course. Admettons, par exemple, que le cylindre soit rempli de vapeur à la tension de trois atmosphères ; si l’on chasse dans l’air la vapeur qui se trouve au-dessous du piston, la capacité inférieure du cylindre, communiquant dès lors librement avec l’air extérieur, n’opposera plus à la vapeur une résistance capable de la main-

  1. Guide du chauffeur.
  2. Pour obtenir de la vapeur à haute pression, on chauffe très-fortement l’eau de la chaudière en retenant la vapeur dans la chaudière sans lui donner issue dans le cylindre. Le chauffeur reconnaît, en examinant le manomètre, le moment où la vapeur a atteint le degré de pression qu’il désire communiquer à la vapeur, et ce terme une fois atteint, il ouvre le robinet qui lui donne accès dans le cylindre ; la machine commence alors à fonctionner. Pendant la marche de la machine, le chauffeur observe toujours la hauteur du manomètre, et il règle la chaleur du foyer de manière à entretenir la vapeur au même degré de tension.