Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 1.djvu/20

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Caus. Sa vie est racontée succinctement à l’envers du panneau : on y fixe à l’année 1630 la date de sa mort.

Un document authentique nous permet de rectifier la date assignée ici à la mort de Salomon de Caus.

M. Ch. Read, chef de section à la Préfecture de la Seine, a trouvé dans un des registres d’enterrement des protestants de Paris, conservés au greffe du Palais de justice, l’acte d’inhumation de Salomon de Caus. Cet acte, qui prouve, en même temps, que Salomon de Caus était huguenot, a été communiqué à l’Académie des sciences de Paris, le 28 juillet 1862. Il est ainsi conçu : « Salomon de Caulx, ingénieur du roy, a été enterré à la Trinité, le samedi, dernier jour de février 1626, assisté de deux archers du guet. »

Ainsi Salomon de Caus est mort à Paris, dans l’exercice des fonctions d’ingénieur pour les travaux commandés par le roi. Il fut enterré au cimetière de la Trinité. Ce cimetière occupait l’emplacement actuel du passage Basfour, à l’endroit même où passe aujourd’hui la rue de Palestro[1].

Au milieu des simples événements de cette vie paisible, partagée entre la culture des beaux-arts et les devoirs d’une profession libérale, il est difficile de reconnaître le savant que l’on a coutume de nous représenter comme devançant son époque, et devinant, deux siècles avant nous, les applications mécaniques de la vapeur. L’obscur ingénieur qui passa ignoré de ses contemporains et de ses successeurs, est loin de répondre à ce personnage de génie dont le type convenu semble déjà être acquis à l’histoire. Examinons maintenant les passages de ses écrits que l’on a invoqués pour lui attribuer la découverte de la machine à vapeur.

L’ouvrage de Salomon de Caus, les Raisons des forces mouvantes, se compose de trois livres, qui ont pour titres, le premier : les Raisons des forces mouvantes ; le second : Desseings des grottes et fontaines propres pour l’ornement des palais, maisons de plaisance et jardins ; et le troisième : Fabrique des orgues. C’est dans le premier livre, les Raisons des forces mouvantes, que se trouve l’article relatif à la vapeur d’eau.

Le titre de cet ouvrage pourrait faire croire qu’il est consacré tout entier à l’étude des forces qui mettent en jeu les machines. Cependant il ne renferme que six pages relatives à l’équilibre de la balance, du levier, de la poulie, des roues à pignons dentelés et de la vis ; le reste est consacré à la description de diverses machines hydrauliques propres à l’élévation des eaux. Vient ensuite l’exposition des moyens à employer pour construire des grottes artificielles, des fontaines rustiques et des cabinets de verdure pour l’ornement des jardins. Le troisième livre est un traité pratique assez complet de la fabrication des orgues d’église.

Donnons une idée des matières contenues dans le premier livre.

Dans un court préambule, l’auteur, suivant les principes de la physique de son temps, annonce qu’il se propose de définir les quatre éléments des corps, parce que tous les effets des machines se rapportent à ces éléments. Comme la définition de l’air contient une ligne que l’on invoque quelquefois en faveur de Salomon de Caus, nous citerons textuellement le passage qui la renferme.

« Définition première. — Le feu, dit Salomon de Caus, est un élément lumineux, chaud, très-sec et très-léger, lequel par sa chaleur fait grande violence.

« Il y a deux espèces de feu, l’un élémentaire, lequel je crois être la chaleur du soleil, car tout autre feu ou la chaleur est sujet à nourriture ; la seconde espèce de feu est le matériel, lequel est dit ainsi, à cause qu’il est nourri et maintenu de matière corporelle, laquelle matière venant à faillir, faut aussi la chaleur : quant à ce qu’il est dit lumineux, c’est à

  1. C’est en raison de cette circonstance qu’un décret impérial, du 2 mars 1864, a donné le nom de rue Salomon de Caus, à l’une des rues qui encadrent le square des Arts-et-Métiers, à quelques centaines de mètres de l’emplacement de l’ancien cimetière de la Trinité, où reposèrent les restes mortels de Salomon de Caus.