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page 251), l’éperon du Solférino, en d’autres termes, l’avant d’un vaisseau cuirassé.

Nous représentons aussi (figure 120, page 253) une frégate cuirassée de notre flotte de combat : l’Héroïne.

Personne n’ignore que la première frégate cuirassée, créée en France, fut la Gloire, construite dans les chantiers de Toulon, en 1858, sous la direction de M. Dupuy de Lôme. Le succès le plus complet couronna les efforts de cet éminent ingénieur. Des perfectionnements de détail ajoutés depuis, ont fait de ce genre de navire, un type original, qui est devenu réglementaire pour les frégates de guerre de cette espèce.

Nos frégates cuirassées actuellement à flot, réunissent à la fois l’élégance, la grâce des lignes, et l’aspect imposant et sévère des bâtiments de la marine militaire. D’une finesse excessive dans les œuvres vives, elles font voir au premier coup d’œil qu’elles sont destinées à réaliser une grande vitesse. Leur mâture proportionnée à leur coque, s’harmonise parfaitement, et rappelle les plus élégantes frégates d’autrefois.

La frégate l’Héroïne est revêtue de bout en bout, d’une cuirasse de fer de l’épaisseur de 0m,12 à 0m,15.

Le poids total du blindage représente 1 000 tonneaux. La batterie armée de 36 canons se chargeant par la culasse, est assez élevée au-dessus de sa ligne d’eau, pour permettre de faire feu dans toutes les positions.

L’hélice, du diamètre de 5m,90 mise en mouvement par une machine à vapeur de 900 chevaux, donne au navire une vitesse moyenne de 12 à 13 nœuds.

L’avant de la frégate abaissé perpendiculairement, représente son éperon. Son inclinaison de haut en bas, peut produire le même résultat destructif que l’éperon des vaisseaux le Solférino et le Magenta.

L’Héroïne a 70 mètres de longueur et 17 de largeur. La force de sa machine à vapeur est de 900 chevaux. Elle porte 36 canons rayés du calibre de 30.

Ce type de bâtiment est une des gloires de nos constructions navales. Il réunit toutes les conditions indispensables à un bon croiseur : marche, solidité, etc. Au premier engagement naval sérieux, la France pourra prouver à son ennemi, d’une manière tout à fait concluante, qu’elle a le génie pratique des choses de la mer, et qu’elle n’a rien à envier, sous ce rapport, à aucune nation maritime.

Beaucoup de marines étrangères, l’Espagne, l’Italie, le Portugal, ont recherché les types de nos frégates cuirassées. Les essais auxquels on les a soumises en plusieurs occasions, ont donné raison aux principes qui ont présidé à leur construction.


En présence de ces divers changements que la machine à vapeur a permis d’apporter à notre marine de guerre, on se demande quelle influence exercera ce système nouveau, quand il sera généralisé et adopté par toutes les nations qui possèdent une marine de quelque importance. Nous avons traité avec quelque étendue, cette question, dans un de nos ouvrages. On nous permettra donc de rapporter ici ce que nous disions à ce propos, dans l’Année scientifique de 1863.

« La guerre maritime, disions-nous, s’exerce par trois moyens différents : 1o par l’attaque ou la défense des côtes et des points fortifiés ; 2o par les croiseurs et les corsaires ; 3o par les combats de navire à navire. Voyons les modifications que les bâtiments cuirassés ont apportées ou pourront introduire dans ces diverses opérations de la guerre maritime.

« Attaque et défense des côtes ou des points fortifiés. — La nouvelle découverte a révolutionné cette partie de l’art de la guerre. D’une part, les places réputées imprenables, telles que Cronstadt, Gibraltar et Malte, ne le sont plus. Les batteries, autrefois si redoutées, qui hérissent tous les abords de ces places, ne seront plus, en effet, que de faibles obstacles