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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 1.djvu/396

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ton-boîte était chassé rapidement à l’intérieur du tuyau. Des réservoirs de vide, ou d’air comprimé, étaient distribués sur le trajet du tube, afin de profiter du travail des pompes, dans l’intervalle des envois. L’arrêt du piston-boîte se produisait au moyen d’une introduction d’air destiné à ralentir la marche, et d’un tampon, muni de ressorts, comme ceux des wagons des chemins de fer, pour produire l’arrêt complet.

Les essais faits à Londres du système de M. Latimer Clarke ayant justifié les prévisions de l’inventeur, une ligne de tuyaux fut établie, à titre d’expérience, par la Compagnie des postes, et fonctionne depuis 1858 dans cette ville, pour le transport des dépêches[1].

La poste pneumatique ou atmosphérique existe aujourd’hui et fonctionne dans quelques quartiers de Londres. Quatre tuyaux atmosphériques relient le bureau central de la compagnie de la poste pneumatique, à quatre succursales voisines, dont la plus éloignée se trouve à 1 400 mètres.

Enfoncés dans le sol à 80 centimètres de profondeur, les tuyaux sont en alliage à base de plomb ; leur diamètre est de 4 à 5 centimètres ; ils sont enfermés dans des tuyaux en fonte, pour les traversées des rues.

Les dépêches sont placées dans des étuis en cuir, de 10 centimètres de longueur, qui glissent à frottement, le long des parois intérieures des tuyaux. Une machine à vapeur fait le vide dans ces tubes. Les communications entre le réservoir et les conducteurs sont établies à l’aide de petits tuyaux en plomb munis de robinets.

Voici comment se fait l’envoi des paquets, ou lettres, à travers ce système de tuyaux.

La succursale qui a une dépêche à trans-

  1. En France, l’idée de la locomotion par la pression atmosphérique a été poursuivie, mais sans amener encore de résultats sérieux. Un inventeur fécond, mais qui ne put jamais réussir à attirer sur lui l’attention publique, Ador, mort il y a dix ans, eut l’idée d’appliquer à la télégraphie la vitesse de 300 mètres environ par seconde, que l’on peut imprimer par la compression ou la raréfaction de l’air, à un piston cheminant dans un tube souterrain. Selon M. l’abbé Moigno, l’expérience du système Ador aurait été faite avec succès dans le jardin des Tuileries. Mais on le voit, il ne s’agissait pas ici de transport d’objets matériels, mais seulement de signaux télégraphiques.

    Un autre inventeur ingénieux, M. Galy-Cazalat, a étudié la même question en France. En 1855, M. Galy-Cazalat fit une expérience du système Ador, devant une commission de la Société des inventeurs, présidée par M. le baron Taylor.

    Enfin, un ingénieur français aujourd’hui au Mexique, M. Kieffer, a développé le même projet et s’est occupé de faire adopter à Paris la poste atmosphérique. Dans une brochure publiée en 1862, sous ce titre : Réforme du service de la poste dans l’intérieur de Paris et des grandes villes, par M. Amédée Sébillot, ingénieur, ce projet a été décrit avec de grands détails. On trouvera dans notre Année scientifique et industrielle (6e année, pages 71-78), une analyse détaillée de ce projet, qui toutefois n’a pas eu de suite.

    Nous ajouterons qu’il est regrettable que l’on n’ait pas continué, à Paris, les essais qui avaient été commencés, à la demande de M. Kieffer et avec le concours de l’administration des postes, du système pneumatique qui fonctionne à Londres, et que M. Kieffer voulait importer à Paris.

    En supposant que la poste pneumatique (pneumatic dispatch, comme disent les Anglais) ne doive rencontrer, dans l’exécution pratique, aucun inconvénient, on ne saurait contester l’importance de la réforme qui serait ainsi réalisée dans le service des postes. Il existe, en effet, une différence choquante entre le progrès qu’a fait depuis trente ans le transport des lettres à grande distance, et leur expédition dans l’intérieur des villes. Une lettre qui mettait naguère six jours à parvenir de Paris à Marseille, y arrive aujourd’hui en vingt heures, grâce aux chemins de fer. Mais le service postal de l’intérieur des villes est bien loin d’avoir suivi une impulsion correspondante à cet immense progrès. Dans les villes, le service de la petite poste est resté à peu près ce qu’il était il y a trente ans, et il est aujourd’hui insuffisant pour les exigences du public. La plus grande partie des lettres qui circulent dans l’intérieur des villes comme Paris, exigeraient une très-grande rapidité d’expédition. Souvent, un retard de deux ou trois heures rend une missive inutile, et l’on se décide à recourir à un exprès, dont on se dispenserait fort bien, si le service s’exécutait avec promptitude. Dans le service actuel, il faut, à Paris, environ quatre heures pour qu’une lettre, si pressante qu’elle soit, arrive à sa destination. L’adoption du système pneumatique pour l’expédition des lettres, ou paquets de petite dimension, réaliserait ici un avantage important : un quart d’heure au plus serait nécessaire pour l’échange d’une lettre et de sa réponse. Ce seraient les avantages de la télégraphie électrique, moins ses inconvénients. La télégraphie électrique ne transmet, en effet, qu’un très-petit nombre de mots, payés à un prix élevé, et livrés à découvert ; en outre, tout envoi matériel lui est interdit. Aujourd’hui que la multiplicité des affaires réclame une extrême rapidité dans la réception des dépêches, le service postal de la capitale est devenu, nous le répétons, insuffisant, et demande une réforme. Les essais dus à divers inventeurs, l’expérience faite récemment en Angleterre, semblent prouver que la solution de ce problème se trouve dans l’adoption du système pneumatique.