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Ainsi la voiture à vapeur de M. le baron Séguier reproduisait, autant que possible, les dispositions de nos véhicules ordinaires. Chaque côté de la voiture avait son moteur, comme une voiture à deux chevaux ; et l’une et l’autre machine pouvaient accroître, ou réduire, à volonté, leur puissance « absolument, dit M. Séguier, comme si deux chevaux la traînaient, et que, pour tourner, le cocher ralentît l’allure de l’un, et accélérât l’allure de l’autre ».

Si les idées avaient continué de se porter sur les voitures à vapeur, elles auraient certainement conduit à la création définitive, et à l’emploi général de ce moteur sur les grandes routes. Mais en 1830, le grand coup de théâtre de la découverte des locomotives, vint subitement couper court à ce genre d’études. La question de la locomotion par la vapeur, fut résolue avec tant d’éclat, d’une si éblouissante manière, par la découverte des locomotives destinées à glisser sur des rails de fer, que la question des voitures à vapeur destinées aux grandes routes, se trouva d’un coup, pour ainsi dire, supprimée.

Elle n’a reparu au jour que depuis peu d’années, par suite de la vulgarisation des locomobiles. En voyant les machines à vapeur agricoles se transporter aisément sur les routes des campagnes et les chemins vicinaux, malgré les inégalités et le frottement excessif de ces routes, on est revenu, peu à peu, à l’idée des voitures à vapeur.

La singulière facilité avec laquelle les rouleaux compresseurs circulent sur le macadam de la capitale, sans entraver la circulation, sans effrayer les chevaux, sans produire autre chose qu’un profond étonnement et une admiration naïve dans l’esprit des passants, ont aussi contribué, comme nous le disions plus haut, à tourner de nouveau les idées vers les voitures à vapeur.

Un habile constructeur de Nantes, M. Lotz aîné, a construit une voiture à vapeur, qui, soumise à différents essais, a donné d’assez bons résultats.

Les premières expériences de la voiture à vapeur de M. Lotz, eurent lieu à Nantes, en 1864.

De nouvelles expériences furent faites, à Paris, sur le quai d’Orsay, au mois d’août 1865, dans la partie comprise entre le palais du Corps législatif et le Champ-de-Mars. La locomobile de M. Lotz traînait une voiture contenant des voyageurs. Elle pouvait s’arrêter instantanément, tourner à volonté, et se diriger à travers les voitures et les passants.

Le 25 novembre 1865, la même expérience fut répétée, mais sur une plus grande échelle. Il s’agissait d’un véritable voyage. L’administration municipale de Paris avait chargé une commission de procéder à un essai attentif de la voiture à vapeur de M. Lotz. Le résultat de ce voyage a été consigné dans un journal de Paris. M. Bouchery rapportait comme il suit, dans ce journal, cette expérience intéressante.

« La machine, attelée d’un omnibus, devait partir du pont de l’Alma, pour se rendre à Saint-Cloud, en traversant le bois de Boulogne, monter la côte de Montretout, et revenir à Paris par Ville-d’Avray et le Point-du-Jour. Cet itinéraire, sans parler de son étendue (28 kilomètres à peu près), comportait, on le voit, tous les éléments de déclivité et d’obliquité indispensables pour constituer une expérience sérieuse. Celle d’hier a eu lieu en présence de MM. Tresca, sous-directeur du Conservatoire des arts et métiers ; Combes, directeur de l’École des mines ; Vallès, ingénieur en chef des Ponts et chaussées ; Jacquot, ingénieur en chef des Mines ; ces trois derniers membres de la commission nommée par M. le préfet de la Seine pour faire un rapport sur les résultats donnés par la machine, et aussi en présence de plusieurs autres personnes appartenant au monde savant ou industriel.

L’appareil qu’il s’agissait de voir fonctionner est une machine de la force de 12 chevaux, et dont la chaudière est timbrée à 8 atmosphères. Le poids total de la machine, son chargement d’eau et de charbon compris, est de 8 000 kilos ; les jantes des roues ont une largeur de 20 centimètres ; la cheminée, articulée afin d’être baissée, s’il y a lieu, au passage des voûtes, a une hauteur de 4 mètres 22 centimètres.