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CHAPITRE X

principes et règles pour la construction des paratonnerres. — instruction de gay-lussac adoptée et publiée par l’académie des sciences de paris en 1823. — nouvelles instructions publiées en 1825.

L’abbé Bertholon avait préludé, dans le Midi de la France, à l’établissement d’un grand nombre de paratonnerres ; et il avait été conduit par l’observation, à un certain nombre de règles empiriques qui servaient de guide dans cette circonstance.

Guyton de Morveau et Maret, dans un rapport fait à l’Académie des sciences de Dijon, en 1784, avaient essayé de formuler quelques principes relatifs à la construction des paratonnerres. Les physiciens Charles et Leroy donnèrent, au commencement de notre siècle, plus de précision à ces règles.

En 1823, la foudre avait occasionné de grands ravages en France. À cette occasion, le ministre de l’intérieur demanda à l’Académie des sciences de Paris, de rédiger une Instruction pratique, qui pût servir de guide aux constructeurs et ouvriers, pour l’établissement des paratonnerres que l’on se disposait à élever dans la plupart des communes. Chargé de ce travail, Gay-Lussac rédigea un travail qui peut être considéré comme un modèle, par la netteté des vues théoriques et la simplicité des indications pratiques.

Le rapport de Gay-Lussac fut distribué avec une profusion extrême, et largement répandu, grâce à notre gouvernement, par tous les moyens de publicité. L’étranger profita, aussi bien que la France, de ce document, qui devint une sorte de manuel populaire, où, pendant trente ans, on a puisé les notions simples et précises dont on avait besoin pour construire et installer cet appareil protecteur.

Cependant un travail scientifique, qui remontait à l’année 1823, avait besoin d’être soumis, de nos jours, à une révision attentive. Sans doute, tout ce qu’a écrit Gay-Lussac en 1823, sur la manière d’établir un paratonnerre, demeure encore aujourd’hui exact et vrai. Mais les modifications qui ont été apportées depuis ce temps, au système et surtout aux matériaux des constructions, ont placé les édifices dans des conditions toutes nouvelles par rapport à l’électricité atmosphérique. Dans les édifices d’autrefois, l’emploi des métaux, particulièrement du fer et du zinc, était restreint presque exclusivement au faîtage, aux gouttières, aux tirants de consolidation. Dans les constructions modernes, au contraire, le métal prédomine de plus en plus. Dans les bâtiments d’aujourd’hui, on trouve partout du fer, de la fonte ou du zinc, que l’on emploie en grandes masses et sur de grandes superficies : couvertures de métal, charpentes de métal, poutres de métal, croisées de métal, colonnes de métal, quelquefois même murailles de métal.

Sur des édifices ainsi composés, la foudre a nécessairement plus de prise que sur les anciennes maisons qui n’admettaient que de la pierre et du bois. Les nuages orageux peuvent décomposer, par influence, des quantités d’électricité décuples ou centuples de celles qu’ils auraient décomposées avec des corps moins bons conducteurs, comme l’ardoise ou la brique, le bois, la pierre, le plâtre, le mortier et tous les anciens matériaux des édifices. Ce nouveau système de construction réalise donc, sur une échelle immense, ce que l’on reprochait aux paratonnerres à la fin du dernier siècle : il attire la foudre.

Le palais de l’Industrie, qui fut bâti aux Champs-Élysées en 1854, pour recevoir les produits de l’Exposition universelle, était, comme tous les édifices modernes, abondamment pourvu de pièces de construction métalliques. Sur l’étendue de trois hectares qu’il occupait, on avait élevé un édifice de 40 mètres de hauteur, où il entrait, depuis la base jusqu’au sommet, des masses énormes de fer, de fonte et de zinc. La compagnie qui avait entrepris d’élever ce vaste monument,