Aller au contenu

Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 1.djvu/674

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Davy, dès le lendemain, décomposa la soude. Il dut, toutefois, employer une pile plus puissante.

Disons, en passant, que les piles voltaïques, employées par Davy dans ces expériences mémorables, n’avaient rien de bien inusité pour l’énergie. Celle qui servit à décomposer la potasse était formée de 250 plaques de 6 et de 24 pouces. On réussit même avec 100 plaques seulement de 6 pouces. Les personnes qui ont attribué le succès des recherches du chimiste anglais à l’emploi de batteries énormes, étaient donc fort injustes envers lui.

Les travaux de Davy furent interrompus à cette époque par une grave maladie. Pendant sa convalescence, et grâce à une souscription de ses concitoyens, une pile de 600 couples de 4 pouces, fut construite et mise à sa disposition. Il dirigea cette artillerie contre les terres ; mais elles furent plus difficiles à réduire que la potasse et la soude. Il réussit pourtant à décomposer la baryte, la strontiane et la chaux, et put isoler les métaux contenus dans ces oxydes. En soumettant à l’action de la pile des fragments de strontiane et de baryte, il vit une flamme apparaître à la pointe du fil négatif. Comme le défaut de conductibilité électrique des terres était l’obstacle qui l’arrêtait, il augmenta cette conductibilité électrique en chauffant avec un peu d’acide borique les oxydes qu’il soumettait à l’action du courant. Grâce à cet artifice, la matière inflammable se montra plus facilement.

Mais Davy reconnut qu’il n’y avait qu’un moyen de recueillir le corps combustible dégagé : c’était de former un alliage de ce corps avec des métaux, et pour cela, de soumettre à l’action de la pile, les terres mélangées avec un oxyde de plomb, de mercure ou d’argent.

Voici donc le procédé dont le chimiste anglais fit usage pour obtenir quelques parcelles de métaux terreux. Il réduisait en poudre de la baryte, de la strontiane, de la magnésie ou de la chaux, ajoutait à ces terres un tiers de leur poids d’oxyde de mercure, et plaçait ce mélange dans une lame de platine façonnée en godet, dans lequel il introduisait un peu de mercure recouvert d’huile de naphte. Il se servit pour ces dernières expériences d’une pile de 500 paires. Il obtint ainsi des amalgames qui, distillés dans des tubes de verre pleins de vapeur de naphte, donnèrent pour résidus des corps blancs qui, à l’air, se transformaient en augmentant de poids, en baryte, strontiane, chaux et magnésie.

Davy en était là de ses recherches, lorsqu’il reçut de Berzélius une lettre contenant la description d’un très-ingénieux procédé qui avait permis à l’illustre chimiste de Stockholm, aidé du docteur Pontin, de décomposer la baryte et la chaux assez facilement et sans grand appareil.

Berzélius et Pontin avaient eu l’heureuse idée de placer, au pôle négatif de la pile, du mercure métallique contenu dans une petite cavité creusée sur un fragment de baryte ou de chaux. Le mercure facilitait la réduction de l’oxyde en s’amalgamant au fur et à mesure avec le métal rendu libre[1].

  1. Le mémoire de Davy, qui renferme l’histoire de ses tentatives pour la décomposition de la baryte, de la strontiane, de la chaux, et qui a pour titre : Recherches électro-chimiques sur la décomposition des terres, fut lu le 30 juin 1808 à la Société royale de Londres. Voici comment Davy raconte l’expérience de Berzélius, répétée par lui-même au laboratoire de l’Institution royale :

    « Un globule de mercure, formant le circuit d’une batterie composée de cinq cents couples de six pouces carrés, faiblement chargée, fut posé sur de la baryte légèrement humectée, placée sur une lame de platine. Le mercure perdit peu à peu de sa fluidité, et quelques minutes après il se couvrit d’une pellicule blanche de baryte. Lorsqu’on jeta l’amalgame dans de l’eau, il se dégagea de l’hydrogène, le mercure revint à son état primitif, et l’eau fut reconnue être une solution de baryte.

    « Avec la chaux, les résultats furent exactement les mêmes.

    « Il n’y avait point à douter que cette méthode ne réussît également avec la strontiane et la magnésie, et je me hâtai de tenter l’expérience. La strontiane me donna un résultat immédiat ; mais je ne pus d’abord me procurer d’amalgame avec la magnésie. Cependant, en prolongeant l’opération et entretenant cette terre continuellement humide, j’obtins enfin une combinaison de sa base avec le mercure, laquelle reproduisit lentement de la magnésie en absorbant l’oxygène de l’air ou celui de l’eau. »