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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 1.djvu/90

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nait, la pompe de Newcomen était déjà très-répandue en Angleterre. Employée, dans un grand nombre de mines de houille, à l’épuisement des eaux, elle y remplaçait les moteurs anciennement en usage, et elle avait contribué à faire sortir cette branche de l’industrie britannique de l’état précaire où elle avait longtemps langui. Il était donc facile de prévoir de quelle importance serait, pour l’avenir du pays, une modification de cette machine qui, tout en ajoutant à la puissance de ses effets, permettrait d’économiser une grande partie du combustible.

Watt embrassa d’un coup d’œil toute la portée de la tâche qu’il allait entreprendre. Mais les travaux de sa profession absorbaient la plus grande partie de ses moments et l’empêchaient de suivre ses expériences avec l’attention et les soins nécessaires. Il prit donc la résolution de se consacrer tout entier à l’étude expérimentale de la machine à vapeur.

Une circonstance nouvelle le décida à hâter l’exécution de ce projet. Il s’occupait avec ardeur des travaux de son atelier, pour venir en aide à sa famille, que de nouveaux revers venaient de réduire à un état voisin de la misère. La seule distraction qu’il se permettait, c’était de se rendre, le dimanche, dans une maison de campagne située aux environs de Glascow, et habitée, pendant la belle saison, par un de ses oncles, M. Miller. Or, M. Miller avait une fille de dix-huit ans. James Watt s’éprit de la jeunesse, des charmes et des qualités aimables de sa cousine, et sa demande ayant été agréée, il épousa miss Miller en 1764.

Cette union, en lui assurant une certaine aisance, le détermina à fermer le petit atelier qu’il occupait dans les bâtiments de l’université de Glascow. Il s’établit dans l’intérieur de la ville, avec l’intention d’y exercer la profession d’ingénieur civil, et de s’occuper en même temps de ses recherches sur le perfectionnement de la machine de Newcomen.

Les heureuses qualités de miss Miller exercèrent sur la carrière de Watt, la plus heureuse influence. Quoique doué au suprême degré du génie de la mécanique, le célèbre constructeur avait dans le caractère une indolence assez marquée. Celui qui, sur la fin de sa vie, disait : « Je n’ai connu que deux plaisirs, la paresse et le sommeil », avait besoin de ce doux et secret empire qu’exerce le cœur d’une femme aimée pour réveiller et tenir en haleine son insoucieux génie.

Cette influence ne tarda pas à se manifester, car ce fut en 1765, un an après son mariage, que Watt, donnant enfin un corps aux idées qui depuis longtemps flottaient dans son esprit, réalisa la première et peut-être la plus importante de ses découvertes, celle du condenseur isolé.

On a vu que le vice capital de la machine de Newcomen consistait dans la nécessité de refroidir et de réchauffer alternativement le cylindre, pour y opérer la condensation de la vapeur : le refroidissement du corps de pompe, par suite de l’injection d’eau froide, faisait perdre l’effet utile des trois quarts du combustible employé. Le problème, regardé jusque-là comme insoluble par tous les ingénieurs, de condenser la vapeur sans refroidir le corps de pompe, fut complétement résolu, grâce à l’idée admirable qui vint à l’esprit de James Watt, de condenser la vapeur dans un vase isolé, séparé du cylindre et ne communiquant avec lui que par un tube.

On conçoit en effet, que si, au moment où le corps de pompe est rempli de vapeur, on ouvre tout à coup une issue à cette vapeur, à l’aide d’un robinet qui lui donne accès dans un vase continuellement entretenu à une basse température par un courant d’eau froide, toute la vapeur se précipitera dans l’intérieur de ce vase en raison de son expansibilité. Le vide sera même obtenu de cette manière beaucoup plus promptement, car la condensation de la vapeur appellera presque instantanément dans le second vase toute la vapeur qui remplissait le corps de pompe. Ainsi la con-