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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 2.djvu/132

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cents signaux par minute, ou, pour mieux dire, il n’y avait d’autre limite à leur expédition que la dextérité de l’employé.

Malgré ces dispositions ingénieuses au point de vue mécanique, le télégraphe à signaux, le télégraphe Foy-Bréguet, ne pouvait être que d’un emploi transitoire. Outre l’inconvénient d’exiger deux fils au lieu d’un seul, il limitait le développement de la télégraphie, en l’enchaînant au vieux système du vocabulaire de Chappe. Il ne laissait aucune trace matérielle des signaux, et ne permettait ainsi aucun contrôle. Il était spécial à la France et ne pouvait servir à établir la continuité des communications entre la France et l’étranger, qui fait usage d’autres systèmes. Il ne pouvait donc aspirer qu’à servir de transition entre les deux modes de télégraphie. Cette transition effectuée, et quand la télégraphie électrique eut pris en France une certaine extension et une certaine importance, il fallut supprimer le télégraphe à signaux.

La révolution de Février avait placé M. Flocon à la tête de la télégraphie française, en remplacement de M. Alphonse Foy. Au mois de novembre 1849, M. Alphonse Foy reprenait sa place, comme directeur de l’administration des télégraphes. Il conserva ces fonctions jusqu’au mois d’octobre 1853, époque à laquelle il fut remplacé par M. de Vougy.

Le télégraphe à signaux suivit M. Alphonse Foy dans sa retraite. Un décret du 11 juin 1854, qui introduisait divers changements dans l’organisation générale de l’administration des télégraphes, fit connaître officiellement la nécessité d’apporter au matériel du service des améliorations, reconnues indispensables. À la suite de ce décret, l’abandon des appareils Foy-Bréguet fut décidé.

Quel est le système nouveau que la télégraphie française adopta, après un examen approfondi de tous les appareils de ce genre ? Ce fut le télégraphe américain, l’appareil Morse.

Les considérations qui motivèrent, de la part de l’administration française, le choix du système Morse, étaient parfaitement fondées. En premier lieu, ce système tend à être adopté universellement. Il règne aux États-Unis et dans les autres parties de l’Amérique où a pénétré la nouvelle télégraphie. En Europe, il fonctionne dans l’Allemagne, la Belgique et la Suisse. Or, il importe au plus haut degré, pour faciliter la transmission des dépêches internationales, que les divers États européens s’accordent à faire usage d’un même appareil télégraphique. C’était donc déjà obéir à une sage pensée que d’adopter un système qui réunissait en sa faveur le suffrage des principaux États de l’Europe.

On peut ajouter, comme considérations d’ordre secondaire, qui ont motivé l’adoption de l’appareil américain, l’avantage précieux qu’il présente, de transmettre l’électricité à des distances très-considérables, sans aucune interruption dans le fil conducteur ; condition que ne remplissent point tous les systèmes rivaux. Un dernier avantage de l’appareil Morse, c’est qu’il a pour résultat de laisser une impression matérielle de nature à être conservée. Comme l’instrument transcrit lui-même sur le papier la dépêche envoyée par le correspondant, on peut conserver le texte authentique du message, et, si une erreur s’est glissée dans la traduction ou la transmission d’une dépêche, reconnaître celui des employés qui a commis l’erreur.

C’est le 1er mars 1851 que le télégraphe électrique fut mis, en France, à la disposition du public et que les premiers bureaux furent ouverts à Paris ainsi que dans plusieurs villes des départements.

Un bureau de télégraphie électrique se compose d’une pièce divisée en deux parties par une cloison grillée et vitrée ; derrière ce vitrage, deux employés attendent le public. L’un d’eux vous présente une feuille de papier blanc sur laquelle vous inscrivez, en termes aussi laconiques que possible, votre missive, que vous signez et dont