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loupe, MM. Bailey et Ehrenberg reconnurent que ces débris ne consistaient qu’en coquillages excessivement petits, sans aucune parcelle de sable ou de gravier. Or, comme le fit remarquer M. Bailey, s’il existait au fond de l’Atlantique, sur les points où ont été opérés les sondages, des courants sensibles et de nature à offenser les câbles télégraphiques, ces courants entraîneraient des parcelles enlevées au fond, telles que du limon ou des grains de sable, et mêleraient ces débris aux coquillages. L’absence de tout débris de ce genre dans les coquillages examinés, démontrait donc qu’à cette profondeur les eaux de l’Océan n’éprouvent aucune agitation.

Mais, dira-t-on, comment une sonde a-t-elle pu pénétrer jusqu’à la profondeur de plus de 3 000 mètres, que présente sur quelques points de ce trajet le bassin de l’Atlantique ? Comment surtout une sonde peut-elle en rapporter des corps étrangers reposant sur ce fond ? Une sonde très-ingénieuse, imaginée par Brooke, lieutenant de la marine américaine, et que l’on nomme, à juste raison, sonde de Brooke, a permis de résoudre ce problème.

Nous décrirons ici cet instrument, qui a été d’un grand secours, tant pour rapporter des corps étrangers du fond de la mer, que pour faciliter les opérations du sondage dans les grands fonds. Avant l’invention de cet instrument, dont le commandant Maury et le lieutenant Berrymann firent usage avec le plus grand succès, les opérations de sondage par les grandes profondeurs étaient à peu près impossibles, et on renonçait à l’opération, après une certaine hauteur d’eau.

La tige de fer qui termine la sonde de Brooke est creuse et enduite de suif, afin de retenir et de rapporter les échantillons du sol du fond de la mer. À cette extrémité, elle traverse un boulet de canon, percé de part en part, d’un trou qui la laisse aisément passer. Aussitôt que la tige a touché le fond, le boulet se dégage par un déclic, et la sonde peut être retirée avec facilité. C’est ce que font voir les figures 136 et 137.

La figure 136 représente la sonde de Brooke destinée à rapporter des parcelles du fond de la mer, On voit, à part, sur la même figure, le cercle qui contient le boulet assis sur une calotte de cuir H.

A est un boulet percé de part en part d’un trou et portant sur sa circonférence une rainure creusée pour recevoir les cordes E, E. B est une tige à laquelle est fixé un double bras CD se mouvant autour de l’articulation D, à laquelle le boulet est suspendu par les cordes E, E.

À l’intérieur de cette tige terminale, creuse, on introduit plusieurs tuyaux de plumes d’oie, ouverts aux deux extrémités et maintenus par leur propre élasticité ; Au point S, à l’intérieur du tube G est une petite soupape qui s’ouvre à l’extérieur pour permettre à l’eau de la mer de sortir à mesure que le sable s’introduit dans les tuyaux de plume et qui se referme lorsqu’on remonte la sonde, permettant ainsi de rapporter des spécimens du fond de la mer.

La figure 137 représente l’appareil ayant touché le sol. Alors, le boulet agissant par son poids sur le bras CD, fait baisser ce bras, et la corde se sépare de son crochet.

Le boulet est donc abandonné au fond de la mer ; la tige B remonte seule, tirée par la corde F, du bord du navire, et rapportant à l’intérieur les corps étrangers rapportés du fond et qui sont demeurés engagés dans les tuyaux de plume, ou fixés au suif qui garnit son extrémité G.

On comprend que cet appareil fonctionnera aussi bien dans la vase que sur le roc, car il suffit d’un léger obstacle rencontré dans la descente pour que le boulet se détache.

Les sondages du lieutenant Maury ont prouvé à quelle exactitude on peut arriver avec cet appareil.