Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 2.djvu/332

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À côté des produits de l’impression naturelle, on voyait à l’Exposition universelle de 1867, une série d’œuvres galvanoplastiques dignes d’intérêt à bien des égards. Nous voulons parler de l’Imprimerie à l’usage des aveugles, dont plusieurs spécimens existaient dans le petit pavillon consacré à l’exposition de la Suède et dans celle de l’Autriche.

C’est une belle chose, la science qui dévoile à notre esprit les ressorts cachés de tous les phénomènes de l’univers ; c’est une belle chose, l’industrie qui nous apprend à tirer le parti le plus utile des forces qui nous entourent ; mais on leur reproche, non sans raison peut-être, de trop laisser dans l’ombre le côté moral, l’un des plus beaux attributs de l’humanité. Que la science étende à l’infini le cercle de ses conquêtes ; qu’entre ses mains, l’électricité obéissante se plie à tous nos désirs ; qu’elle transforme la vapeur en un agent universel, propre à exécuter les travaux les plus délicats, comme à triompher des plus formidables résistances, on admire de tels résultats, on s’étonne de leur grandeur. Mais combien la science nous paraît noble et touchante, quand elle applique ces mêmes moyens à adoucir les maux de nos semblables ! Quel sentiment profond de reconnaissance s’élève en nos cœurs, lorsqu’après avoir créé, avec la photographie, toutes les merveilles qui nous charment, après avoir découvert de magiques propriétés dans l’action de la lumière, le savant vient à songer encore aux infortunés qui ne la voient pas !

De tous les malheureux qui souffrent sur cette terre, il n’en est pas de plus à plaindre que les aveugles ; on ne peut réfléchir un instant à leur sort, sans ressentir une compassion profonde. De ces infortunés le nombre est d’ailleurs plus considérable qu’on ne l’imagine. Interrogez la statistique, elle vous dira qu’il existe en France, plus de 30 000 aveugles ; on en trouve le même nombre dans les pays allemands, et la Hongrie en compte 24 000. Si vous passez en d’autres climats, la proportion est bien plus élevée encore : vous trouverez en Égypte 1 aveugle sur 150 habitants.

C’est de ce peuple d’affligés, épars dans les divers points du monde, que le conseiller Aüer, directeur de l’Imprimerie impériale de Vienne, s’est préoccupé en composant, par les moyens économiques de la galvanoplastie, une imprimerie en relief applicable à la lecture et à l’écriture. Après avoir étudié les principaux moyens d’impression à l’usage des aveugles, qui sont employés chez les divers peuples depuis que Valentin Haüy conçut cette idée ingénieuse et touchante, M. Aüer a composé une imprimerie très-simple, grâce à laquelle un aveugle peut rapidement écrire, ou plutôt composer, des pages d’imprimerie, qui lui permettent d’ex-

    et objets analogues, tel qu’il est indiqué dans un rapport fait à la Chambre de commerce de cette ville, le 2 août 1852, par M. le secrétaire Holdans.

    « On enduit le coupon original de dentelle, destiné à être copié, d’une mixture d’eau-de-vie et de térébenthine de Venise, et on le pose, tendu, sur une planche de cuivre ou d’acier bien polie. On y superpose ensuite une lame de plomb pur, également polie, et l’on fait glisser, à l’aide d’une presse, les deux planches renfermant l’échantillon de dentelle, entre deux cylindres, qui exercent momentanément une pression de 800 à 1 000 quintaux. Aussitôt qu’on a détaché les planches, on reconnaît que le tissu de la dentelle s’est empreint dans la lame de plomb ; on l’en écarte avec précaution, et le dessin apparaît en creux sur la lame de plomb.

    « Comme on veut obtenir, dans le but d’en tirer des imprimés, une planche très-dure, il faut ensuite employer les procédés ordinaires de stéréotypie ou de galvanisation, par lesquels on peut multiplier, à l’infini, le nombre des planches destinées à l’impression.

    « Comme on n’imprime par la presse typographique que des gravures en relief, il est clair que les planches stéréotypiques obtenues ayant le fond relevé et le dessin de la dentelle en creux, le premier s’imprime avec une couleur quelconque, tandis que le dernier garde la couleur du papier qu’on y a employé.

    « C’est là l’ensemble du procédé. Tout dessin, quelque compliqué qu’il soit, peut par là être multiplié à l’instant, de la manière la plus fidèle, dans les détails les plus délicats, et à un prix qui égale celui de l’impression ordinaire.

    « S’il s’agissait d’objets qui pourraient être endommagés par cette méthode, on enduirait l’original d’une solution de gutta-percha et l’on se servirait de la forme de cette matière comme de matrice, dans le traitement galvanique, après l’avoir imprégnée d’une solution d’argent. »