Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 2.djvu/457

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minée à sa partie inférieure par un cône tronqué autour duquel régnait une large galerie où se tenaient les sept voyageurs. La calotte supérieure était blanche, le reste grisâtre, et le cône composé de bandes de laine de différentes couleurs. Aux deux côtés du globe étaient attachés deux médaillons, dont l’un représentait l’Histoire, et l’autre la Renommée. Enfin il portait un pavillon aux armes de l’intendant de la province, avec ces mots : le Flesselles.

Le ballon n’était pas depuis un quart d’heure dans les airs, quand il se fît dans l’enveloppe une déchirure de 15 mètres de long. Le volume énorme de la machine, le nombre des voyageurs, le poids excessif du lest, le mauvais état des toiles, fatiguées pas de trop longues manœuvres, avaient rendu inévitable cet accident, qui faillit avoir des suites funestes. Parvenu en ce moment à 800 mètres de hauteur, l’aérostat s’abattit avec une rapidité effrayante. On vit aussitôt, à en croire les relations de l’époque, soixante mille personnes courir vers l’endroit où la machine allait tomber. Heureusement, et grâce à l’adresse de Pilâtre, cette descente rapide n’entraîna pas des suites graves, et les voyageurs en furent quittes pour un choc un peu rude. On aida les aéronautes à se dégager des toiles qui les enveloppaient : Joseph Montgolfier avait été le plus maltraité.

Cette ascension fit beaucoup de bruit et fut jugée très-diversement. Les journaux en donnèrent les appréciations les plus opposées. En définitive, l’entreprise parut avoir échoué ; mais ses courageux auteurs reçurent les hommages qui leur étaient dus. M. Mathon de Lacour, directeur de l’Académie de Lyon, raconte ainsi l’accueil qu’ils reçurent dans la soirée :

Fig. 267. — Montgolfière lancée à Milan, le 25 février 1784, montée par le chevalier Andreani et les frères Gerli (quatrième voyage aérien) (page 454).

« Le même jour, dit M. Mathon de Lacour, on devait donner l’opéra d’Iphigénie en Aulide. Le public s’y porta en foule dans l’espérance d’y voir les voyageurs aériens. Le spectacle était commencé, lorsque M. et madame de Flesselles entrèrent dans leur loge, accompagnés de MM. de Montgolfier et Pilâtre de Rozier, Les applaudissements et les cris se firent entendre dans toute la salle ; les autres voyageurs furent reçus avec le même transport. Le parterre cria de recommencer le spectacle, et l’on baissa la toile. Quelques minutes après, la toile fut levée, et l’acteur qui remplissait le rôle d’Agamemnon s’avança avec des couronnes que madame l’intendante distribua elle-même aux illustres voyageurs. M. Pilâtre de Rozier posa celle qu’il avait reçue sur la tête de M. de Montgolfier, et le prince Charles posa aussi celle qu’on lui avait offerte sur la tête de madame de Montgolfier. L’acteur, qui était rentré dans sa tente, en sortit pour chanter un couplet qui fut vivement applaudi. Quelqu’un ayant indiqué à M. l’intendant l’un des voyageurs (M. Fontaine), qui se trouvait au parterre, M. l’intendant et M. de Fay, commandant, descendirent pendant l’entr’acte et lui apportèrent la couronne. Quand l’actrice qui jouait le rôle de Clytemnestre chanta le morceau :

Que j’aime à voir ces hommages flatteurs !

le public en fit aussitôt l’application et fit recommencer le morceau, que l’actrice répéta en se tournant vers les loges où étaient les voyageurs. Après le