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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 3.djvu/484

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a la forme d’un trèfle. D’autres carabines ont pour section un polygone régulier : hexagone, octogone, etc. M. Whitworth, lorsqu’il a présenté sa carabine à section hexagonale, ainsi que ses canons de la même section, n’a donc fait que ressusciter un très-vieux moyen.

Ces différents modes de chargement laissaient beaucoup à désirer ; aucun n’avait pu être adopté ou maintenu, car aucun ne réunissait les conditions essentielles de tout bon forcement. Ces conditions sont les suivantes :

1o Le forcement doit être assuré, c’est-à-dire que la balle doit pénétrer suffisamment dans les rayures, pour ne pas s’en dégager au moment du tir.

2o Il doit être complet, c’est-à-dire qu’aucun jour ne doit exister entre le pourtour de la balle et les parois du canon, condition sans laquelle les gaz exerceraient une pression inégale sur les différentes parties de la surface du projectile, et le dévieraient de sa direction.

3o Enfin, il doit être régulier, c’est-à-dire s’effectuer constamment de la même manière, pour que le tir soit lui-même très-régulier.

Tout cela posé, arrivons à l’invention de M. Delvigne.

Frappé des inconvénients des divers modes de chargement jusqu’alors en usage pour les armes rayées, cet officier eut l’idée de pratiquer au fond de l’âme, une chambre cylindrique, plus étroite que le canon, et destinée à recevoir la poudre. Il forma ainsi, à l’orifice supérieur de la chambre, un rebord saillant, ou ressaut, dont il eut soin de faire tomber l’arête vive par une fraisure conique, en rapport avec le diamètre de la balle, Quant à la balle, il lui donna très-peu de vent, mais la choisit pourtant d’un calibre assez faible pour qu’elle pût glisser librement jusqu’au fond du canon, à l’entrée de la chambre, où elle trouvait un point d’appui solide sur le rebord fraisé. Il suffisait ensuite de deux ou trois coups de baguette pour la comprimer fortement, l’aplatir, et l’engager dans les rayures, en un mot pour la forcer d’une manière suffisante.

Fig. 350. — Section longitudinale de la carabine Delvigne.

La figure 350 représente une coupe longitudinale de l’âme de la carabine Delvigne à balle forcée. On voit sur cette figure l’extrémité de la baguette, A, qui, en frappant sur la balle B, produit le forcement, ainsi que les dimensions respectives de la chambre à poudre C et de l’âme de la carabine D.

M. Delvigne présenta sa carabine au Ministre de la guerre, qui la renvoya à l’examen d’une commission militaire. Les membres de cette commission furent d’avis qu’elle n’était pas susceptible de satisfaire à un service de guerre, et qu’on ne pouvait songer à en doter l’armée. Ils se fondaient sur les motifs suivants :

En premier lieu, sous le choc de la baguette, une partie de la balle pénétrait dans la chambre, en écrasant plus ou moins, les grains de poudre. Il en résultait que le plomb, trouvant une issue de ce côté, ne pénétrait qu’imparfaitement dans les rayures ; d’où un