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En résumé, l’amirauté anglaise a voulu, dans ces dernières constructions navales, assurer le plus grand et plus rapide champ de tir à une artillerie réduite à un petit nombre de bouches à feu. Il reste à savoir si l’artillerie, utile de loin, ne doit pas, de près, être bien moins utile que l’attaque à toute vitesse, par le choc de l’éperon. L’important, parmi tant de qualités diverses que l’on peut demander aux bâtiments de guerre, est de ne pas compromettre celles qui sont vraiment essentielles et indispensables, pour d’autres qui ne sont qu’accessoires.

En présence d’un problème aussi complexe, notre rôle d’historien se borne à rapporter les solutions qui lui sont actuellement données par les diverses nations maritimes.

On a vu qu’en Angleterre même, les derniers bâtiments projetés, ceux mis en chantier en 1868, rentrent tous, à l’exception du garde-côtes et du bélier, dans le système à fort central. À la Chambre des communes, dans la séance du 13 juillet 1868, lord H. Lennox, répondant à diverses interpellations, déclarait que, jusqu’à ce moment, l’amirauté n’a eu en main aucun modèle de navire à tourelles capable de tenir la haute mer qu’elle puisse consciencieusement adopter, et qu’il ne serait pas sage de prendre une décision à cet égard avant qu’on ait fait, en 1869, les expériences convenables avec les deux navires en voie d’achèvement, le Monarch et le Captain.

On a vu plus haut, comment le vaisseau cuirassé français, le Marengo, par son éperon, par la concentration et l’aménagement de son artillerie dans un fort central et dans des tours latérales à plates-formes tournantes, enfin par ses formes, répond au programme que l’on s’est récemment tracé en Angleterre pour le bâtiment qui doit réunir les qualités nautiques aux qualités de combat.

En France, grâce à une administration qui apprécie à sa juste valeur le rôle qu’est appelée à jouer la marine dans la solution des grands intérêts de l’avenir ; grâce aux travaux du génie maritime et, en particulier, de M. Dupuy de Lôme, l’illustre ingénieur qui, promoteur de la révolution survenue dans l’architecture maritime, est chargé depuis 1856 de la direction de notre matériel naval ; grâce aux préoccupations constantes de l’Empereur, qui porte dans ces questions le double intérêt de l’inventeur et du chef de l’État, plusieurs bâtiments sont en chantier, utilisant les nouveaux progrès de la métallurgie et les derniers secrets des sciences nautiques et militaires.


CHAPITRE XI

les dernières constructions navales cuirassées des états-unis. — la marine cuirassée au brésil. — la marine cuirassée en italie et en russie.

Au moment où s’alluma la guerre de la sécession, les fédéraux, maîtres des chantiers de construction de l’Amérique du Nord, se proposèrent de créer une force navale spécialement destinée, non pas à agir au loin, mais à prêter sur les côtes et les rivières, un auxiliaire important aux opérations militaires dirigées contre la confédération du Sud.

De là cette classe de navires appelés Monitors, du nom du premier d’entre eux qui fut construit. Nous avons décrit ce type dans le chapitre consacré aux navires à tourelles de l’Amérique, et nous avons raconté le célèbre combat naval dans lequel le Monitor et le Merrimac déployèrent leur égale valeur.

Immédiatement après le combat d’Hampton-Road, le gouvernement américain fit construire un grand nombre de Monitors appartenant au même système. Tels furent le Dictator de 97m,60 de long, et le Puritain, dont le pont mesure 100 mètres. Bientôt une trentaine de monitors à une tourelle, construits sur divers types, purent être mis en service.

Ces bâtiments ont pris une part active à la guerre, et avec eux, le New-Ironsides, navire