Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 4.djvu/26

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voyage qu’il méditait depuis longtemps, le suspendit pour seconder M. Montgolfier dans les expériences aérostatiques qu’il fit pendant les mois de septembre et d’octobre de la même année ;

« Que ce fut dans le même temps et à la même occasion, que MM. Quinquet et Lange, invités à partager les fatigues de ces expériences, employèrent toute l’adresse, toute la persévérance imaginables pour parvenir à dérober à M. Argand un secret et un mécanisme qui n’étaient pas pour eux un simple objet de curiosité ;

« Que M. Faujas, M. Montgolfier, M. Réveillon, et beaucoup de personnes qu’attirait l’étonnant spectacle de l’aérostat, ont été témoins de l’infatigable opiniâtreté de MM. Quinquet et Lange dans leurs questions sur les lampes de M. Argand ;

« Que ce fut à cette époque que l’inventeur s’expliqua sur cette découverte avec M. Assier Perricat, le pria de lui faire des tubes ou cylindres de verre, et lui annonça qu’il lui en faudrait un très-grand nombre ;

« Que M. Meunier de l’Académie des sciences et M. Argand se firent alors la mutuelle confidence de l’idée nouvelle d’adapter une cheminée à des lampes pour augmenter l’activité du feu ;

« Que M. le marquis de Cabières, admirant le prodigieux effet d’une lampe encore incomplète, reconnut que l’inventeur avait pourvu à tout, lorsque M. Argand lui eut expliqué la forme et les effets de la cheminée, ou cylindre de verre antérieurement commandé à M. Assier Perricat ;

« Qu’avant d’aller à Londres pour y faire exécuter avec précision une lampe complète, M. Argand présenta celle qu’il avait fait faire par un ferblantier de Montpellier à M. Lenoir ; et que ce magistrat, en ayant vu l’effet, appela M. Saugrain, entrepreneur de l’illumination de Paris, pour être témoin de la grande lumière qu’elle répandait ;

« Que, dans le mois de janvier 1784, la cheminée ou cylindre de cristal fut adaptée, dans les ateliers de MM. Huster père et fils, à la lampe de M. Argand ; qu’elle fut vue et applaudie par des personnes savantes, par plusieurs membres de la Société royale, et notamment par M. Tibérius Cavallo, qu’il suffit de nommer ;

« Que le comte de Milly, de l’Académie des sciences, s’occupant vers la fin de 1783 de recherches sur les moyens les plus faciles de soutenir les aérostats, apprit de M. Faujas la découverte de M. Argand, en fit honneur au dernier dans un mémoire lu à l’Académie le 21 janvier 1784, et prévint qu’il ne citait l’auteur de cette ingénieuse lampe, que pour lui conserver le mérite de la découverte contre des personnes qui ont voulu le copier et tâchent de la disputer ;

« Que c’est postérieurement à tant de faits que MM. Quinquet et Lange ont présenté leur informe et défectueuse copie à M. Lenoir ;

« Que M. Lenoir leur dit sur-le-champ : C’est la lampe de M. Argand ; qu’ils se dénoncèrent eux-mêmes à ce magistrat, en avouant qu’ils tenaient de ce physicien le principe de cette lampe, et qu’ils en devaient l’exécution aux perquisitions qu’ils avaient faites au sujet de tubes ou cylindres de verre qu’il avait commandés.

« Des dates, des faits de l’espèce de ceux-ci, sont plus que surabondamment constatés par un si grand nombre de témoins. Et quels témoins !

« Le Gouvernement n’a pas dédaigné d’entrer dans ces détails. C’est après s’être assuré de la vérité, qu’il leur a donné l’authenticité la plus respectable par un arrêt du Conseil, et des lettres patentes ; et M. le garde des sceaux a bien voulu donner son agrément à la grâce distinguée de l’enregistrement, même en temps de vacation.

« Un succès si imposant, si complet, doit effacer jusqu’aux plus légères traces des contradictions blessantes qu’a éprouvées M. Argand. Son unique vœu doit être aujourd’hui de justifier, par des travaux utiles, les grâces que daigne lui accorder le plus juste des souverains, et l’appui d’un ministre aussi sage qu’éclairé[1]. »

Il est donc parfaitement démontré que Quinquet s’était borné à imiter la lampe d’Argand, d’après les renseignements qu’il avait pu recueillir, tant auprès de l’inventeur qu’auprès des personnes au courant de ses travaux.

Le bec d’Argand, tel qu’il fut découvert et perfectionné par lui, est formé de deux tuyaux concentriques A, B (fig. 9). L’intervalle qui sépare ces deux cylindres est fermé inférieurement, et communique par un tuyau C, avec le réservoir d’huile, dont le niveau doit être à peu près à la même hauteur que les bords supérieurs des cylindres. Dans l’espace qui sépare ces deux cylindres se place une mèche, formée d’un tissu lâche, en coton. La circonférence inférieure de cette mèche, D, est fixée dans un anneau de métal I, attaché à une tige EF, tige qui s’élève à une hauteur plus grande que celle du bec, descend, et se termine par un crochet. Cette tige, qui se place dans la coulisse G, est destinée à faire monter ou descendre la mèche.

Un cylindre de verre H (fig. 10), dont le

  1. Découverte de la lampe à double courant d’air et à cylindre, par Paul Abeille.