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le dernier obstacle, pour l’application aux lampes du mouvement des horloges. Voyez plutôt. »

Et il présenta au pharmacien une petite pièce de cuivre, véritable miniature de pompe aspirante et foulante, qui, en effet, contenait la solution sans réplique du problème de l’éclairage par les huiles. Carreau examina longtemps ce chef-d’œuvre de l’art, le fit adapter devant lui au tuyau de la lampe, préparé à cet effet, et put se convaincre de la perfection du mécanisme.

« Bravo ! s’écria-t-il enfin ; il n’y a plus rien à désirer. À compter d’aujourd’hui notre association commence, et à bientôt la fortune ! Vous recevrez demain les fonds nécessaires pour le commencement de la fabrication, et pour la prise du brevet qui portera nos deux noms. »

Ayant dit, le citoyen Carreau sortit de la boutique, non sans jeter sur la ménagère un regard de triomphe, qui se croisa avec le regard courroucé que cette dernière lui lançait. Huit jours après, on lisait sur l’enseigne de la boutique :

B.-G. CARCEL
Inventeur des lycnomènes ou lampes mécaniques,
fabrique lesdites lampes.

Comment Carcel avait-il eu l’idée d’appliquer un mouvement d’horlogerie à mettre en action le piston d’une petite pompe foulante, pour élever constamment l’huile, du pied de la lampe, où se trouve le réservoir, jusqu’au bec où elle se consume ? Il nous semble qu’il dut concevoir cette idée, en considérant les effets d’une lampe populaire, à bas prix, fort en usage dans le midi de la France, et qui était connue sous le nom de lampe à pompe, et, par abréviation, de pompe. Dans cette lampe, une petite pompe aspirante et foulante sert à élever dans un réservoir cylindrique, placé non loin du bec, l’huile contenue dans le pied. La lampe à pompe, encore très-répandue aujourd’hui dans le midi de la France, n’est pas d’origine récente ; elle était connue et fort en usage bien avant les travaux d’Argand. On peut dire qu’elle constitue le seul perfectionnement que la lampe à huile ait reçu depuis l’antiquité. Nous l’aurions décrite avant de parler de l’invention d’Argand, si nous n’avions jugé plus utile à la clarté de ce récit, de renvoyer à cette place sa description. La lampe à pompe de nos pays méridionaux va, en effet, nous servir à faire comprendre le mécanisme et les avantages de la lampe à mouvement d’horlogerie : ce sera comme la transition naturelle, par voie de perfectionnement, à la lampe de Carcel.

La figure 22 représente la lampe à pompe.

Fig. 22. — Lampe à pompe du midi de la France.

Construite en étain pour les parties extérieures, et en fer-blanc pour le mécanisme intérieur, elle ressemble à un chandelier qui porterait une chandelle d’étain. Dans le pied de la lampe A, est le réservoir d’huile, ainsi que la petite pompe foulante qui sert à amener dans le réservoir une certaine quantité d’huile, quand la quantité est épuisée ou diminuée. La