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science toutes les questions qui se rattachaient à l’éclairage de notre littoral.

Le premier acte de cette commission fut de réduire considérablement les dimensions des mèches adoptées par Borda. Après des expériences concluantes, on reconnut qu’une mèche de 14 millimètres de diamètre, donne infiniment plus de lumière et dépense beaucoup moins d’huile, que celles de 80 millimètres, qui avaient été employées jusqu’alors. La substitution fut opérée avec grand avantage.

François Arago faisait partie de la Commission des phares, et il avait été chargé par ses collègues de diriger les expériences. Mais Arago se laissait absorber par d’autres soins, et le travail avançait peu. En 1819, il chercha un homme capable de l’aider dans ce travail difficile. Son choix tomba sur un jeune ingénieur des ponts et chaussées, qui s’était déjà fait connaître par quelques belles recherches d’optique, mais qui n’occupait qu’une position très-inférieure, en province.

Cet ingénieur s’appelait Augustin Fresnel. Arago le fit nommer secrétaire de la commission des phares. Quand nous aurons exposé la grande découverte dont Fresnel a doté la science et l’humanité, on comprendra qu’Arago ait écrit plus tard :

« Je dois regarder comme un des bonheurs de ma vie d’avoir, dans cette circonstance, soupçonné qu’un ingénieur, alors presque inconnu, serait un des hommes dont les découvertes illustreraient notre patrie. »

Augustin-Jean Fresnel était né le 10 mai 1788, à Broglie, près de Bernay (département de l’Eure). Son père, qui était architecte, dirigeait la construction d’un fort, dans la rade de Cherbourg, lorsque la Révolution arriva. Forcé d’abandonner cette entreprise, il se retira, avec toute sa famille, dans une petite propriété, située au village de Mathieu, près de Caen. Dans cette humble retraite, il se voua à l’éducation de ses quatre enfants, — deux garçons et deux filles. Il fut bien secondé dans cette tâche par sa femme, dont l’esprit était orné et le cœur excellent. Le nom de famille de madame Fresnel était Mérimée. L’écrivain français qui porte ce nom, littérateur officiel sous tous les régimes, et à qui deux volumes de contes et de romans ont valu le Sénat et l’Académie française, appartient à la même souche.

Le jeune Fresnel ne donna pas tout d’abord de grandes espérances. Une constitution faible lui interdisait un travail assidu. Il aimait peu, d’ailleurs, l’étude du latin. Aussi resta-t-il bien loin derrière son frère aîné, dont les progrès, dans la carrière des lettres, étaient rapides.

À huit ans, Augustin Fresnel savait à peine lire. Cependant ce garçon de huit ans, ses petits camarades l’appelaient l’homme de génie. Expliquons cette contradiction apparente. Augustin Fresnel avait mérité ce titre, assez plaisant dans la bouche de bambins, par l’étrange perfectionnement qu’il avait apporté à la fabrication des arcs, ainsi qu’à la portée de ces canonnières d’enfants que l’on fabrique avec une branche de sureau. Grâce à notre petit artilleur, ces armes étaient devenues quelque peu dangereuses. Les parents s’en alarmèrent, et après une assemblée solennellement tenue, l’usage de ces engins de guerre fut interdit à la troupe de nos écoliers militants.

À l’âge de treize ans, Augustin Fresnel quitta la maison de son père, pour aller continuer ses études à l’école centrale de Caen. Ses aptitudes pour les mathématiques, commencèrent alors à se révéler. En 1804, il entra à l’École polytechnique, où son frère avait été admis une année auparavant.

Augustin Fresnel eut, peu de temps après, le bonheur de fixer l’attention du mathématicien Legendre. Ayant donné une solution originale d’un problème de géométrie, il reçut les compliments les plus flatteurs de son maître. Dès lors il douta moins de lui-