Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 4.djvu/464

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

premier l’emportant de beaucoup sur celle du second, le prix de l’unité de lumière envoyée à l’horizon s’est trouvé réduit dans une très-forte proportion. »

À la suite des expériences comparatives faites au cap de la Hève, la Commission des phares se prononça en faveur de la nouvelle lumière. Elle proposa d’éclairer définitivement à la lumière électrique les deux phares de la Hève, en employant des machines plus puissantes que celles qui avaient été essayées.

Une décision ministérielle, en date du 23 mars 1865, sanctionna ce projet. Les nouveaux appareils fonctionnent au cap de la Hève, depuis le 2 novembre 1865. L’action motrice est fournie par deux machines à vapeur, de la force de cinq chevaux, qui mettent en mouvement quatre machines magnéto-électriques à six disques de seize bobines. Cet appareil est installé dans un bâtiment spécial situé à mi-chemin entre les deux phares. En temps ordinaire, une seule machine à vapeur fonctionne et fait marcher une machine magnéto-électrique pour chaque phare. En temps de brume, tous les appareils sont doublés.

Les régulateurs de la lumière ont été fournis par M. Serrin. L’intensité du faisceau lumineux émané de l’appareil lenticulaire est de près de 5 000 becs Carcel. Deux machines fonctionnant simultanément produisent donc une lumière qui équivaut à l’énorme puissance éclairante de 10 000 becs Carcel ! Cette intensité exceptionnelle sera, dit-on, nécessaire pendant près de 400 heures par an (1/10e de l’année, en ne comptant que les heures de la nuit).

Les frais de premier établissement des appareils d’éclairage, sont, sans aucun doute, plus considérables pour la lumière électrique que pour les lampes à huile. Il faut deux salles de plus pour établir les machines ; et le personnel est augmenté de deux hommes. L’eau douce, nécessaire pour la machine à vapeur, manquant presque toujours, doit être demandée à de vastes citernes qui recueillent les eaux pluviales. De là des dépenses supplémentaires ; au cap de la Hève, elles se sont élevées à 46 000 francs.

En ce qui concerne les appareils optiques, l’avantage est du côté de la lumière électrique. Pour les deux phares de la Hève, on a dépensé 72 800 fr., tandis qu’on en aurait dépensé 94 000, si l’on y avait installé des lanternes à l’huile. L’économie serait pourtant moins prononcée, s’il s’agissait d’un phare ne comportant qu’un seul feu.

En comptant 3 900 heures d’éclairage utile par an, on trouve, dit M. Reynaud, que l’heure d’éclairage électrique coûte 2 francs 18 centimes pour chacun des deux phares de la Hève, et que l’heure d’éclairage à l’huile coûtait seulement 1 franc 94 centimes. Mais en considérant que l’intensité de la lumière électrique est aujourd’hui huit fois plus grande que celle du feu à l’huile, on trouve que le prix de l’unité de lumière est, toute proportion gardée, sept à huit fois moins élevé lorsqu’on emploie l’électricité.

Le succès de l’éclairage électrique du phare de la Hève a déterminé l’application de ce système à un autre phare de premier ordre. Depuis le mois de décembre 1868, l’éclairage électrique a été installé au phare du cap Gris-Nez sur la côte de la Manche. Dans l’état actuel, nous possédons, on le voit, deux phares importants desservis par la nouvelle source lumineuse.

La lumière électrique n’a encore été employée que dans les phares à feux fixes ; mais des études ont été faites dans le but de l’appliquer également à la production des feux à éclipses. La Commission des phares français, à laquelle les résultats de ces études ont été soumis, est d’avis que le problème est complétement résolu, et la construction d’appareils qui produiront des feux électriques mobiles, est déjà chose décidée.

Toutefois, il faut le dire, l’éclairage élec-