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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 4.djvu/542

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parcourues, par-dessous ces couches, par de véritables rivières souterraines.

L’étage de la craie, qui termine la série des terrains secondaires, et sur lequel reposent les terrains tertiaires, est littéralement criblé de fissures, qui livrent passage aux eaux d’infiltration, et concourent à la formation d’une immense nappe d’eau, supportée par les argiles qu’on trouve immédiatement au-dessous de la craie. C’est cette nappe qui alimente les puits de Grenelle et de Passy ; c’est la même qui alimentera les deux puits qu’on exécute en ce moment à la Butte-aux-Cailles et à la Chapelle-Saint-Denis, près de Paris.

Les terrains tertiaires (sables inférieurs et argile plastiquecalcaire grossiergypsemolassefaluns et crag) ne diffèrent pas sensiblement des terrains secondaires, au point de vue spécial des eaux souterraines. Ils présentent seulement des bassins moins étendus, des couches moins épaisses et plus fréquemment alternantes, c’est-à-dire qu’on y observe une succession moins rare de couches perméables.

La conséquence de tous ces faits, c’est que les eaux artésiennes se rencontrent plus fréquemment et plus facilement dans les terrains secondaires que dans les terrains tertiaires.

Le bassin dont Paris occupe le centre, appartient aux formations tertiaires. Il repose sur la craie et s’étend jusqu’à Beauvais, Compiègne, Laon, Épernay, Montmirail, Montereau. C’est l’un de ceux qui réalisent le mieux la forme en bassin.

Nous ne dirons rien des terrains quaternaires et des alluvions modernes, car, en raison de leur peu de profondeur, ils ne peuvent donner lieu à d’importantes accumulations d’eaux souterraines.

Les terrains secondaires et tertiaires sont donc les seuls qui puissent donner lieu à une exploitation fructueuse.

Les terrains stratifiés présentent souvent, sur un même trajet vertical, différentes nappes liquides, situées à des hauteurs diverses ; et la force ascensionnelle de l’eau varie nécessairement, en des points même très-rapprochés, selon qu’elle provient de telle ou telle nappe. Dans sa Notice sur les Puits forés, Arago cite plusieurs exemples de nappes d’eau ainsi superposées.

Dans le cours des sondages entrepris aux environs de Dieppe, pour y découvrir des gisements de houille, on rencontra successivement sept nappes d’eau très-abondantes et douées chacune d’une grande puissance ascensionnelle. La première était située à 25 ou 30 mètres de profondeur ; la seconde, à 100 mètres ; la troisième, de 175 à 180 mètres ; la quatrième, de 215 à 220 mètres ; la cinquième, à 250 mètres ; la sixième, à 287 mètres ; la septième enfin, à 333 mètres.

Lors du forage des puits de la gare de Saint-Ouen, MM. Flachat constatèrent la succession de cinq nappes liquides superposées, la première à 36 mètres de profondeur, la seconde à 45 mètres, la troisième à 51 mètres, la quatrième à 59 mètres, et la cinquième à 66 mètres. Des faits semblables se sont produits à Saint-Denis, à Tours et dans d’autres localités de la France et de l’étranger.

Rien ne semble plus simple, plus naturel, que l’explication que nous avons donnée de la formation des nappes d’eau souterraines et du fonctionnement des puits artésiens. Avant de s’arrêter à cette théorie, la science a pourtant épuisé les plus singulières hypothèses. Elle s’est perdue dans des idées bizarres, qui ne devaient s’évanouir que devant la méthode de l’expérience et de l’observation directe. Comme ces hypothèses appartiennent à l’histoire des puits artésiens, nous devons en dire quelques mots.

Suivant Aristote, l’air répandu dans la profondeur de la terre, se change en eau, et cette eau s’élève jusqu’à la surface du sol, sous l’influence de causes diverses. Ces causes ont varié, d’ailleurs, selon la fantaisie des au-