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tion universelle de 1855, et qui est peut-être le seul qui existe encore, car cette invention, comme il était facile de s’y attendre, vu son peu d’importance, n’a pas fait fortune, en dépit des espérances enthousiastes de l’auteur.

B est le porte-mèche que l’on peut élever ou abaisser, grâce à l’élasticité de la queue de fer, A, qui pince le verre à la hauteur que l’on désire ; C, est le couvercle en laiton : il est percé d’une grande ouverture centrale et de trous plus petits sur sa circonférence. La mèche est plate et taillée en angle aigu comme on le voit sur le dessin séparé, représentant ce dernier organe.

Ce petit luminaire ne brûle que pour un centime d’huile par heure. Quand on veut s’absenter ou dormir, on pose sur l’ouverture du couvercle un obturateur quelconque, une pièce de monnaie, par exemple : la lampe se transforme alors en veilleuse, et sa lumière est réduite à son minimum ; on ne brûle plus qu’un centime d’huile par nuit. Pour rendre à l’éclairage toute sa puissance, il suffit d’enlever l’obturateur.

Quand on couvre cette lampe d’un réflecteur de papier, on obtient, malgré sa faible consommation d’huile, un éclairage qui est encore suffisant pour lire, écrire, travailler. Mais faisons bien remarquer qu’une seule personne peut profiter de cette clarté, car la quantité d’huile consumée et celle de lumière produite sont réduites aux plus faibles proportions possibles, et calculées pour suffire exactement, mais non au delà, à l’éclairage d’une personne : c’est pour cela que la lampe Jobard avait été baptisée par Froment, du nom de lampe pour un. Je proposai, en 1855, à l’inventeur de l’appeler la lampe du pauvre, et ce nom lui est resté.

Fig. 42. — Jobard.

La lampe Jobard, qui brûle pendant une nuit entière sans laisser former de champignons sur la mèche, a donné lieu de découvrir la cause de la formation de ces champignons qui étouffent les veilleuses ordinaires. Il a été reconnu, d’après le fait de leur non-apparition sur les mèches de la lampe du pauvre, dans laquelle la combustion se fait en un vase fermé, que c’est à l’agitation de l’air qu’il faut attribuer la formation de ces champignons. Lorsque, par suite de l’agitation de la flamme, un point du lumignon d’une veilleuse se trouve exposé à l’air, ce point découvert rougit au contact de l’oxygène atmosphérique, et le carbone provenant de la combustion de l’huile, s’y accumule. Mais si le lumignon n’est jamais en contact direct avec l’oxygène atmosphérique, s’il reste toujours enveloppé par la flamme, c’est-à-dire par le gaz qui résulte de la combustion, aucune accumulation de carbone, c’est-à-dire aucune production de champignon, ne s’y observe. La lampe Jobard a donc permis de reconnaître la cause physique de ce petit phénomène, dont les anciens, dans leur impuissance à l’expliquer, avaient fait un mauvais présage :

Testa cum ardente viderent
Scintiliare oleum et putres concrescere fungos,


dit Virgile.