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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 5.djvu/660

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extraordinaire, sans secousse, ni traînée sur le sol.

La stabilité de la nacelle fut le fait le plus remarqué. Les oscillations du ballon ne se transmettaient aucunement à la nacelle. Pendant toute l’ascension, on pouvait aller et venir sur ce plancher mobile, comme sur la terre ferme.


Tel est le résumé du long travail technique que les Comptes rendus de l’Académie des sciences ont publié. Demandons-nous maintenant quels furent les résultats positifs de cette expérience.

Dupuy de Lôme avait-il résolu le problème de la direction des aérostats ? Nous ne le croyons pas. En faisant usage de moyens de locomotion et de direction depuis longtemps connus et expérimentés, le célèbre ingénieur de marine n’a pas obtenu de résultat sensiblement supérieur à ceux de ses devanciers. La vitesse propre de 10 kilomètres à l’heure, enregistrée par l’auteur, nous paraît plutôt faite pour démontrer l’échec que la réussite de sa tentative.

Dupuy de Lôme n’a-t-il donc rien obtenu ? N’a-t-il rien inventé ? Loin de là. Le résultat auquel il est arrivé mérite des éloges, et doit lui attirer la reconnaissance de tous ceux qui attachent l’importance qu’elle mérite à la question de la navigation aérienne. Dupuy de Lôme a réalisé une sérieuse découverte : il a assuré la stabilité, la tranquillité absolue de la nacelle. Grâce au système ingénieux de suspension, grâce au filet de balancines, qui prévient toute oscillation de la nacelle, quelle que soit l’agitation de l’aérostat qui la surmonte, Dupuy de Lôme vint fournir une base solide (au propre comme au figuré) aux recherches qu’il restait encore à faire pour résoudre le problème de la direction des aérostats.

Avant la construction de l’aérostat de Dupuy de Lôme, aucune stabilité n’était garantie à la nacelle, ni aux passagers, ni aux expérimentateurs. Assurés maintenant de pouvoir procéder avec sécurité à leurs observations au milieu de l’air, les aéronautes pourront se livrer tout à leur aise aux expériences concernant la direction.

La seule critique à adresser à l’appareil dirigeable proposé par Dupuy de Lôme s’applique au genre de moteur adopté par lui. On ne peut se contenter de la simple force de l’homme, embarqué comme agent moteur. La force humaine opposée à la puissance du vent, c’est la mouche qui voudrait braver la tempête. Un tel moyen a pu suffire pour les premières manœuvres d’essai de l’aérostat de Dupuy de Lôme, mais il serait impossible, de se contenter d’un tel agent de force. Il faut emporter dans les airs un moteur digne de ce nom.


Nous ajouterons que l’on vit avec peine Dupuy de Lôme ne citer aucun des nombreux savants qui l’avaient précédé dans la même carrière. On fut surpris de ne pas entendre sortir de la bouche de l’illustre ingénieur un hommage aux travaux antérieurs aux siens. Quelques lignes mentionnant, par exemple, la tentative audacieuse et mémorable faite en 1852 par Giffard n’auraient été que de la plus stricte justice ; et cela avec d’autant plus de raison que la forme et les principales dispositions de l’aérostat expérimenté par Dupuy de Lôme rappellent, à s’y méprendre, la forme et les dispositions du célèbre aérostat dirigeable que Giffard construisit et monta en 1852.

Ce rappel des travaux de Giffard, que Dupuy de Lôme aurait pu faire, dans son propre intérêt, les journaux de Paris se chargèrent de le mettre en lumière. L’Illustration publia, dans son numéro de février 1872, une revendication de priorité, avec pièces à l’appui, en faveur de