Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 5.djvu/710

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

gnes de la Galice, en Espagne. Ces montagnes sont sauvages et très peu habitées, ce qui explique qu’un cadavre ait pu y séjourner aussi longtemps sans être signalé.

Après avoir été vu à Bilbao, le ballon le Saladin s’était de nouveau dirigé vers la mer. Il doit donc avoir flotté pendant plusieurs jours encore, avant d’avoir finalement atterri en Galice, où l’on retrouva le corps de l’infortuné voyageur au fond de la nacelle.

Le dessin que nous donnons à la page précédente sur ce funeste accident a été exécuté d’après la description du seul témoin oculaire de la catastrophe, M. David Forsay, constructeur de machines à Éype.


En 1885, deux catastrophes du même genre coûtèrent la vie à deux hommes de cœur et d’énergie, Eloy et Gower.

Eloy était un aéronaute de profession. Il avait, à deux reprises, exécuté de nombreux voyages aériens, et traversé le Pas-de-Calais. Il s’était engagé à entreprendre une ascension à Lorient, à l’occasion de la fête nationale du 14 juillet 1885, dans un aérostat de petite dimension, gonflé au gaz de l’éclairage. Il s’éleva à 6 heures et demie ; mais il ne tarda pas à se trouver au-dessus de l’océan. Bientôt, le ballon dépassa les bateaux du port qui étaient partis en même temps que lui, et qui suivaient sa marche. Mais il fut impossible aux marins de rejoindre l’aérostat, et quand la nuit vint, on le perdit de vue.

Le surlendemain, des marins trouvèrent, au large de l’île de Groix, à la surface de la mer, la casquette et la jaquette de l’aéronaute. Un peu plus tard, un voilier, le Duc, partant pour la Suède, annonça qu’il avait rencontré, au delà de Belle-Isle-en-Mer, un ballon, encore gonflé, mais sans aéronaute. Il est présumable qu’Eloy aura essayé de gagner l’île de Groix, à la nage, et qu’il aura péri, sans avoir pu être recueilli par un navire.


La seconde victime est Frédéric Gower, ingénieur américain bien connu, inventeur du système de téléphone qui porte son nom, ami de M. Graham Bell, et qui avait gagné une certaine fortune par ses découvertes dans le domaine de l’électricité.

Frédéric Gower s’occupait avec passion, depuis quelques années, d’aéronautique, et il avait obtenu un de ces succès qui sont, pour un aéronaute, un brevet d’honneur et de gloire : il avait franchi en ballon la Manche, à l’exemple de Blanchard et de plusieurs autres, dont l’histoire a conservé glorieusement les noms. Le 1er juin 1885 il était parti de Hythe, près de Folkestone, à midi 15 minutes. Il s’était élevé seul, emportant un fort poids de lest, et il était descendu à terre, sur la côte de France, vers Etaples, au sud de Boulogne, à 4 heures du soir. Antérieurement, il avait exécuté plusieurs ascensions avec les frères Tissandier, M. Lachambre et Lhoste, son ami.

C’est en voulant continuer cette série d’ascensions, à la suite de sa brillante traversée de la Manche, que Frédéric Gower trouva la mort.

Il paraît qu’il voulait créer un nouveau système de ballons-torpilles, fonctionnant automatiquement dans l’atmosphère. Après ses premiers essais de ballons libres automatiques, Gower s’était installé à Cherbourg, dans le but d’expérimenter à nouveau ses ballons-torpilles, et de traverser la Manche une seconde fois, de Cherbourg en Angleterre.

Vers le milieu de juillet, deux frégates américaines et une frégate russe vinrent à Cherbourg. M. Gower en profita pour faire d’abord, le vendredi 17, une ascension de courte durée, avec un officier russe. Il descendit sur terre, au Vast, à 22 kilomètres de Cherbourg.