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À dix heures, toujours au-dessus de la mer, un point noir se montre en avant. Arrivés au-dessus des derniers nuages, à 400 mètres de hauteur, les voyageurs reconnaissent qu’ils ont été témoins d’un effet de mirage : ils avaient vu un petit voilier de pêche. Ils avaient également aperçu, par un effet de réfraction, un bateau à vapeur naviguant paisiblement.

Fig. 536. — Lhoste.

À midi, les nuages au-dessous se sont massés ; ils sont d’un blanc éblouissant. Aussi loin que la vue peut s’étendre, on aperçoit une plaine immense, d’un blanc d’argent, à l’altitude de 2 200 mètres. À 2 900, le ballon cesse de monter, on le laisse descendre.

L’ascension avait duré près de huit heures, pendant lesquelles on avait cherché, jusqu’à 4 100 mètres d’élévation, un courant favorable pour franchir le Pas-de-Calais. Mais on ne rencontra jamais ce courant. À midi et demi, le voyage se termina vis-à-vis des dunes d’Etaples, par une sorte de chute sur le sol, d’une hauteur de 700 mètres, à Lottinghen, où l’atterrissage eut lieu.

Une si mauvaise terminaison aurait arrêté un homme plus prudent que Lhoste. Elle ne fît que redoubler son ardeur.

Le vendredi 8 juin, Lhoste s’éleva seul, dans le même ballon, le Pilâtre-de Rozier.

Parti à minuit de l’usine à gaz de Boulogne, par un vent favorable, il traverse la ville, à une altitude de 600 mètres. À une heure, il double le cap Gris-Nez. Devant lui la mer ; un brouillard intense règne dans l’air. À quatre heures, l’altitude est de 1 600 mètres ; le ballon, qui est très mouillé, se sèche. À sept heures, à l’altitude de 4 000 mètres, le ballon est sec. À huit heures, condensation ; descente rapide ; la chute est arrêtée à 500 mètres. À huit heures et demie, l’aéronaute se laisse descendre, il voit une grande ville, son guide-rope est saisi par des hommes : il est sur la place de l’Esplanade, à Dunkerque.

À peine descendu à Dunkerque, Lhoste s’aperçoit que les vents ont pris une direction favorable. Décidé, malgré tout, à tenter de nouveau la traversée du Pas-de-Calais, il fait ses adieux aux habitants de Dunkerque, et reprend son voyage aérien, s’élevant d’un bond à 2 000 mètres d’altitude.

Une heure après, le Pilâtre-de-Rozier était surpris, à environ 7 000 mètres, par un violent orage. Des coups de tonnerre secouaient terriblement le ballon et la nacelle, assourdissant l’aéronaute, et lui enlevant la perception de ce qui se passait autour de lui.

Peu après, légèrement remis de son étourdissement, Lhoste aperçoit la mer sous ses pieds. À deux heures, l’aérostat, descendu avec une vélocité extraordinaire, était à 800 mètres du niveau de la mer. La provision de lest commençait à s’épuiser ; une chute dans la mer paraissait inévitable.

À quatre heures, le ballon n’avait plus