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de Châlons, du colonel Lebel, commandant l’école régionale de tir du camp de Châlons.

La construction d’un fusil à répétition irréprochable présente bien des difficultés.

Un fusil à répétition doit avoir 600 ou 700 mètres de portée et une trajectoire assez tendue pour que la flèche n’en dépasse point, en hauteur, la taille moyenne de l’homme. Il faut que le mécanisme de répétition soit assez perfectionné pour que, sans désépauler, le tireur puisse faire, à jet continu, emploi de toutes les cartouches enfermées dans le magasin. Le mode de chargement de ce magasin doit être assez ingénieux pour que le soldat puisse le remplir aussi facilement, aussi rapidement qu’il remplace aujourd’hui la cartouche simple du fusil Gras, rejetée par l’extracteur. En outre, il faut que le mécanisme servant à l’introduction de la cartouche dans la chambre fonctionne correctement, depuis le premier coup jusqu’au dernier, afin que le tir n’ait point d’interruptions à subir ; — que le passage du tir par coups successifs au tir roulant rapide, ou réciproquement, s’effectue d’une manière simple ; — que le magasin puisse, jusqu’au moment décisif, garder intact l’approvisionnement qu’il contient ; — que le poids de l’arme ne dépasse point la moyenne du poids généralement admis pour les armes portatives ; — que le centre de gravité en soit convenablement situé ; — que l’entretien du mécanisme soit simple et facile ; — que le prix de revient n’en soit pas trop élevé.

Telles sont les principales conditions à remplir.

D’après ce qui a été dit précédemment, on peut distinguer trois catégories de fusils à répétition :

1o Les armes à magasin placé dans la crosse ; de la crosse, les cartouches arrivent dans la boîte à culasse, poussées par un ressort. Tels sont les fusils Winchester, Spencer, Hotchkiss, Evan.

2o Les fusils à verrou, dans lesquels un mécanisme spécial fait arriver les cartouches dans la boîte à culasse, que l’on ouvre pour y placer le magasin à cartouches. Tels sont le fusil autrichien Mannlicher, le fusil Westerli et le fusil Gras à répétition.

3o Les fusils dans lesquels les cartouches sont placées le long du canon, c’est-à-dire dans la monture, dans un canal ménagé le long de cette monture, et qui sont poussées par un ressort à boudin dans la boîte à culasse.

La Commission de Versailles examina et étudia comparativement plus de cinquante formes de fusils, et au mois de décembre 1883 elle fit procéder, par différents corps de troupes, à des essais pratiques et comparatifs sur les deux systèmes les plus rationnels qui avaient été proposés pour l’emmagasinement des cartouches dans les fusils à répétition, à savoir, le système à chargeur, à magasins multiples et amovibles, constitués par de petites boîtes métalliques, dans lesquelles les cartouches sont superposées horizontalement ou juxtaposées verticalement, et le système à répétition proprement dit, dont le magasin fixe et unique, logé le long du canon, dans la monture, contient des cartouches placées à la suite l’une de l’autre, et qui sont poussées par un ressort à boudin, jusqu’au point où le percuteur doit les emflammer.

En 1883 et 1884, le général Campenon, qui était alors Ministre de la guerre, avait songé à pourvoir le fusil Gras d’un magasin. Or, le fusil Gras coûtait déjà 65 francs ; la nouvelle boîte de culasse eût exigé un supplément de dépense de 11 francs 90, et le mécanisme de répétition (magasin) eût coûté 12 francs 60. Cette solution, d’ailleurs, avait le grave défaut d’être incomplète. Car, d’une part, le fusil de petit calibre se serait imposé tôt ou tard ; et d’autre part, il faut qu’une armée n’ait qu’un seul modèle de fusil. Pour le démontrer, il suffirait de se reporter aux événements de la guerre de