Page:Filiatreault - Contes, anecdotes et récits canadiens dans le langage du terroir, 1910.djvu/21

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— Sir, I see by your name on the list of passengers that you are a Frenchman.

— I beg your pardon, Sir, I am a thoroughbred Canadian, a loyal British subject of Her Gracious Majesty, but I speak French, as bad as it may be.

— That’s all right, Sir. It is all I want. Will you kindly interpret a French gentleman who does not speak a word of English ?

— Certainly, Sir, with pleasure.

Il me présenta alors à un touriste qui venait chez nous dans le but d’étudier la géographie du pays. À la brunante, nous étions dans le détroit, nous dirigeant vers le Golfe. Toute la soirée, le Français avait essayé de « m’emplir » avec les beautés et la grandeur de son pays, où les fleuves et les rivières, la Garonne, le Rhin, la Loire, la Seine étaient reconnus comme les plus grands cours d’eau de l’univers. Ça m’était bien égal à moi. Cependant, mon orgueil national était joliment froissé, tout de même. La nuit avait remplacé le crépuscule et nous voyagions sur la surface du golfe sans savoir le moins du monde où nous nous trouvions. À cinq heures le lendemain matin, le golfe était traversé et nous étions rendus à peu près à la hauteur de la Pointe à Miscou, à l’entrée de la Baie des Chaleurs, où la largeur du St-Laurent est de vingt-trois lieues.

— Monsieur, pouvez-vous me dire, s’il vous plait, quelle est cette mer intérieure que nous traversons en ce moment ?

— Ça, une mer ! Mais vous n’y pensez pas, Monsieur, c’est une simple rivière.