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LA FIN DU MONDE

attacher à ce mot. C’est, toutefois, un agent impondérable. Survit-il au corps ? C’est possible. Saint Grégoire de Nysse le pensait. S’il reste uni à l’âme, il peut être appelé à lui redonner un nouveau corps identique à celui que la mort a dissous, lors même que ce corps ne posséderait aucune des molécules qu’il a possédées à un moment quelconque de sa vie terrestre, et ce sera aussi bien notre corps que celui que nous avons eu à cinq ans, à quinze ans, à trente ou soixante ans.

« Un tel corps s’accorde parfaitement avec les expressions de l’Écriture sainte, d’après laquelle il est certain que, après avoir vécu d’une vie séparée, les âmes reprendront leurs corps à la fin des temps et pour toujours.

« À saint Grégoire de Nysse, permettez-moi, révérendissimes Pères, d’adjoindre un philosophe, Leibniz, dont l’opinion était que le principe de la vie physiologique est impondérable, mais non incorporel, et que l’âme reste unie à ce principe lorsqu’elle est séparée du corps pondérable et visible. Je ne prétends ni accepter cette hypothèse, ni la rejeter. Je remarque seulement qu’elle peut servir à expliquer le dogme de la résurrection, auquel tout chrétien doit croire d’une manière absolue.

« — Cette tentative de conciliation entre la raison et la foi, interrompit l’évêque croate, est digne d’éloges, mais elle me paraît plus ingénieuse