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LES MÉTAMORPHOSES

dents, j’y retournai une dernière fois, et j’y trouvai une cité florissante, plus peuplée et plus riche en monuments que la première que j’avais visitée, et, lorsque je voulus me renseigner sur son origine, les habitants me répondirent « La date de sa fondation se perd dans l’antiquité la plus reculée ; nous ignorons depuis quand elle existe, et nos pères, à ce sujet, n’en savaient pas plus que nous. »

N’est-ce pas là l’image de la brièveté de la mémoire humaine et de la petitesse de nos horizons dans le temps comme dans l’espace ? Nous sommes portés à croire que la Terre a toujours été ce qu’elle est ; nous ne nous représentons qu’avec difficulté les transformations séculaires qu’elle a subies ; la grandeur de ces temps nous écrase, comme en astronomie la grandeur de l’espace.

Pourtant tout change, tout se transforme, tout se métamorphose. Le jour vint où Paris, ce centre attractif de toutes les nations, vit pâlir sa lumière et cessa d’être l’astre du monde.

Après la fusion des États-Unis d’Europe en une seule confédération, la République russe avait formé, de Saint-Pétersbourg à Constantinople, une sorte de barrière au développement de l’émigration chinoise qui déjà avait établi des villes populeuses sur les bords de la mer Caspienne. Mais les nationalités antiques ayant disparu avec le progrès ; les drapeaux européens, français, anglais, allemands, italiens, ibériques, ayant été usés, déchirés par les mêmes causes ; les communications de l’est à l’ouest