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Page:Flammarion - La Fin du monde, 1894.djvu/373

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APRÈS LA FIN DU MONDE

Nul génie, nul devin n’aurait pu reconstruire le temps évanoui, ressusciter les anciens jours où la Terre flottait ivre de lumière, avec ses belles plaines verdoyantes s’éveillant au soleil du matin, ses rivières ondulant comme de longs serpents le long des prés verts, ses bois animés du chant des oiseaux, ses forêts profondes aux ombres mystérieuses, ses mers se soulevant sous l’attraction des marées ou mugissant dans les tempêtes, ses montagnes dont les versants débordaient de sources et de cascades, ses sillons d’or, ses jardins émaillés de fleurs, ses nids d’oiseaux, ses berceaux d’enfants, ses populations humaines laborieuses dont l’activité l’avait transformée et qui avaient vécu si joyeusement au soleil de la vie, perpétuées par les ravissements d’un amour sans fin. Alors tout ce bonheur semblait éternel. Que sont devenus ces matins et ces soirs ? ces fleurs et ces amantes ? ces rayons et ces parfums ? ces harmonies et ces joies ? ces beautés et ces rêves ? Tout a disparu.

La Terre morte. Toutes les planètes mortes. Le Soleil éteint. Tout le système solaire annulé. Le temps lui-même suspendu !

Le temps s’écoule dans l’éternité. Mais l’éternité demeure — et le temps ressuscite.

Avant l’existence de la Terre, pendant toute une éternité, il y a eu des soleils et des mondes, des humanités vivant et agissant comme la nôtre aujourd’hui. Elles vivaient ainsi dans le ciel il y a des mil-