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Page:Flammarion - Mémoires biographiques et philosophiques d'un astronome, 1912.djvu/24

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l’hérédité intellectuelle

fiant, les vastes plaines du fertile Bassigny. La vue s’étend jusqu’aux Vosges, jusqu’aux Alpes même, car le Mont-Blanc y est parfois visible, à la distance de 261 kilomètres. Cette visibilité, à une pareille distance, est l’une des plus exceptionnelles sur la Terre entière. On aperçoit également le géant des Alpes, de Clefmont, au nord de Montigny, à 272 kilomètres de la haute cime, et à 478 mètres d’altitude, ainsi que de Langres, dont l’altitude est de 475 mètres et la distance de 249 kilomètres. Le château de Montigny domine l’altitude de la Meuse de plus de cent mètres.

La maison dans laquelle je suis né est une modeste demeure, formée d’un rez-de-chaussée et d’un étage, orientée au levant. Des fenêtres de l’étage, où j’avais l’habitude de faire mes devoirs à la suite des classes, la vue s’étend sur la plaine de la Meuse, qui coule comme un humble ruisseau vers Bourmont, Neuf-château et la Lorraine. Cette maison, sur laquelle le conseil municipal a posé, en 1891, une plaque commémorative de ma naissance, en me faisant l’honneur de donner mon nom à la rue qui commence là, domine une petite place, sur le penchant de la colline couronnée autrefois par le château. Dans mon enfance, un sentier partant de notre jardin conduisait au sommet de la montagne, d’où la vue est légendaire, comme celle du château de Clefmont, son voisin, et des anciens remparts de Bourmont. Ces vues panoramiques immenses, presque sans bornes, rivalisent avec celle des remparts de Langres. Combien de fois ne me suis-je pas assis au bord de ce promontoire avancé, m’isolant des conversations banales, perdu dans la contemplation de l’immensité !