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Page:Flammarion - Mémoires biographiques et philosophiques d'un astronome, 1912.djvu/39

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mémoires d’un astronome

devoirs de son ministère, faisant le bien partout où il pouvait, d’un désintéressement absolu, aimant la bonne chère, buvant sec le vin blanc de Chablis, récolté non loin de là, véritable curé de Bourgogne, passant la vie aussi agréablement que possible en rendant service à tout le monde. Une année de disette, il avait pendant un mois entier fait cuire du pain dans son four pour tout le village. Le presbytère était une ancienne maison contiguë à l’église, à rez-de-chaussée seulement, avec perron donnant sur un jardin exposé à l’ouest, au milieu duquel une charmille abritait une salle de bains. Treilles de chasselas, vue étendue sur la campagne. Il y avait, tout contre le jardin, une vigne, de quoi faire une ou deux pièces de vin, et un verger avec arbres fruitiers de bon rapport, d’excellentes prunes de mirabelle et de reines-Claude. Pommes et poires.

Dans la famille de l’abbé Collin, on était curé de père en fils, ce qui est plutôt rare. Son père, en effet, avait été curé constitutionnel sous la Révolution, s’était marié et avait eu des enfants. L’éducation de mon aimable et spirituel cousin avait été à la fois chrétienne et rationaliste, et aucun préjugé ne paraissait le gêner. Il m’a même semblé, plus tard, qu’il était d’un tempérament assez ardent.

La journée commençait par la messe de six heures, que je servais dévotement. À sept heures et demie, déjeuner d’une soupe au lait. Ensuite devoirs, jusqu’à dix heures. Puis on allait généralement se promener le long du canal de Bourgogne. Après le déjeuner, excursions aux environs, aux châteaux de Tanlay et d’Ancy-le-Franc, qui se complètent l’un par l’autre Tanlay pour le style extérieur, Ancy-le-Franc