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Page:Flammarion - Mémoires biographiques et philosophiques d'un astronome, 1912.djvu/42

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les chemins de fer

on disait qu’on irait bientôt à Dijon en quatre heures et à Paris en dix heures, mais on ne souhaitait pas avoir une gare dans son voisinage. Trois grands hommes, qui exerçaient alors une importante action politique, Thiers, Arago et Lamartine, n’y croyaient pas, et pensaient bien ne jamais se servir de ce mode de locomotion. Quelques années après, en 1855, on construisit la ligne de Paris à Bâle, passant par Langres, où je faisais mes études classiques, et je vis que, là non plus, on ne devinait en aucune façon l’importance économique et sociale de l’invention. Au lieu de faire passer la ligne par les plateaux et par Langres même, on préféra lui faire suivre la vallée et passer à côté, au-dessous, sans contact avec elle, le long de la vallée de la Marne[1]. Le conseil municipal de Montigny pensa de même, si bien que la gare en est à cinq kilomètres.

Ce premier voyage m’avait offert de charmantes vacances en pleine nature, en plein éveil de curiosité enfantine, en pleine vérité. On n’aurait pas pu dire de cette première envolée hors du nid, ce que mon ami Alphonse Daudet a écrit sur la sienne : « Premier voyage, premier mensonge. » C’étaient là de simples vacances, à la fois reposantes et instructives, et à ma rentrée à Montigny, j’étais tout prêt à reprendre l’école avec une nouvelle ardeur. J’entrai dans la classe des grands, et ne tardai pas à conquérir les premières places.

  1. Depuis l’établissement du chemin de fer qui touche Chaumont et laisse Langres à distance, la population de Chaumont a graduellement augmenté et celle de Langres a graduellement diminué.