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Page:Flammarion - Mémoires biographiques et philosophiques d'un astronome, 1912.djvu/47

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mémoires d’un astronome

doués, plus ou moins. Le coteau du château, qui aboutissait à notre maison, avait une petite source, dont le filet d’eau était assez fort après les pluies. J’en avais conclu que les sources ont les pluies pour origine. D’autre part, ayant souvent vu, chez mon grand-père maternel, des roues de moulin actionnées par le cours d’un ruisseau, j’avais construit avec du bois léger de boîtes d’allumettes une roue que j’avais installée au-dessous de la source après avoir fait une rigole et détourné l’eau en forme de petit bief. Ma sœur et mon frère s’y amusaient avec moi, et nous simulions même la meunerie en apportant de petits sacs de blé, en écrasant les grains, en fabriquant de la farine et en faisant de petits pains que l’on mettait cuire au four les jours où ma mère pétrissait et cuisait notre pain quotidien dans la chambre à four contiguë à notre maison. Ces jours étaient des jours de régal, surtout par les bonnes pommes cuites dans une enveloppe de pâte légère et succulente.

Les années 1848 et 1849 ont marqué le réveil des chants populaires et patriotiques, et je leur dois d’avoir appris la musique de très bonne heure. L’instituteur organisa, à l’issue de certaines classes, des leçons de solfège dans lesquelles je ne tardai pas à avoir le premier rang, grâce à une jolie voix de soprano. Aux grands jours, toute l’école célébrait les gloires de la patrie par la Marseillaise et le Chant du départ. La commune avait réorganisé la garde nationale avec une importante musique, d’air militaire, et les enfants de l’école avaient pris l’habitude de l’accompagner. De temps en temps aussi des régiments s’arrêtaient une journée à Montigny, comme étape entre Bourbonne et Langres ; nous allions à leur