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DE GUSTAVE FLAUBERT.

tume voluptueuse. Qu’importe après tout, s’il n’y a que là qu’on puisse vivre, s’il n’y a qu’à cela qu’on puisse penser sans dédain et sans pitié !

Adieu, à toi.


187. À LOUISE COLET.

Entièrement inédite.

[Rouen], sans date[1].

Tu as mal compris, chère amie, le sens de ma lettre où je te demandais si tu voulais me voir. Je ne posais pas l’interrogation pour moi, mais pour toi. Ne m’as-tu pas assez dit que le te rendais malheureuse ?… J’ai l’air (je me fais cet effet-là à moi-même) d’avoir été la calamité de ta vie. Qu’on aime ou qu’on déteste le poison qu’on boit, rien n’en change l’effet ; ceux qui se tuent avec de l’eau-de-vie aiment l’eau-de-vie…

Voici donc ce que j’avais pensé : « Si elle croit que de me voir la rendra pire encore, si une heure, un jour de joie et de larmes mêlées doivent lui laisser encore des mois amers, une longue existence d’ennuis déchirants quand ils ne sont pas mornes, mieux vaut pour maintenant qu’elle ne me voie pas. J’irai dans sa rue, je regarderai sa maison, et je m’en retournerai. Si je la rencontre, tant mieux ; sinon, ce sera tout. » Je t’ai demandé enfin si tu voulais guérir. Je t’offrais un moyen, une chance, et tu as cru que c’était l’hypocrite

  1. À la place habituelle de la date, Louise Colet a écrit de sa main : dernière lettre du lundi 17 février 1847. Notons que le 17 février est un mercredi.