DE GUSTAVE FLÀUBERT. ` 61
masses et ce degré-là. Le parti pris de donner aux.
noirs- le bon côté moral arrive a Yabsurde, dans le
personnage de Georges par exemple, lequel panse
son meurtrier tandis qu’il devrait piétiner des- `
sus, etc., et qui rêve une civilisation nègre, un .
empire africain, etc. La mort de la jeune Saint-
Claire est celle d'une sainte. Pourquoi cela? Je
pleurerais plus si c’était une enfant ordinaire. Le
caractere de sa mère est forcé, 'malgré l`apparente `
demi-teinte que l’auteur y a mise. Au moment de
la mort de sa fille, elle ne doit plus penser à ses
migraines. Mais il fallait [faire] rire_ l_e parterre,
comme dit Rousseau. A ·
Il y a du reste de jolies choses dans ce livre : le
caractere de Halley, la scene entre le sénateur et
sa femme Mrs Ophélia, l,lIlté1'lCUI` de la maison . ·
Legree, une tirade de miss Cussy, tout cela est bien
fait. Puisque Tom est un mystique, je lui aurais _
voulu plus de lyrisme (il eût été peut-être moins
vrai comme nature). Les répétitions des mères
avec leurs enfants sont archirépétées; c’est comme É
le journal du sieur Saint-Claire qui revient a toute l
minute. Les réflexions de l'auteur m’ont irrité tout ·
le temps. Est-ce qu’on a besoin de faire des ré-
flexions sur fesclavage? Montrez-le, voila tout.
Cest la ce qui m`a toujours semblé fort dans le
Dernier jour d’un condamne. Pas une réflexion sur
la peine de mort (il est vrai que la préface échigne
le livre, si le livre pouvait étre échi né). Regarde
dans le Marchand de Venise si l’on dëclame contre
l’usure. Mais la forme dramatique a cela de bon, I
elle annule l’auteur. Balzacn’a pas échappé a ce ·
défaut, il est légitimiste, catholique, aristocrate.
l..'auteur, dans son œuvre, doit étre comme Dieu
Page:Flaubert Édition Conard Correspondance 3.djvu/67
Aller à la navigation
Aller à la recherche
Cette page n’a pas encore été corrigée
