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DE GUSTAVE FLAUBERT.

Eh bien, oui ! c’est cela. Tu l’as deviné ! C’est parce que j’ai la persuasion que, si elle te voyait, elle serait très froide avec toi, peu convenable, comme tu dis, que je ne veux pas que vous vous voyiez. D’ailleurs, je n’aime pas cette confusion, cette alliance de deux affections d’une source différente (quant à elle, tu peux t’imaginer la femme, d’après ce trait : elle n’irait pas, sans invitation, chez son fils aîné). Et puis, d’ailleurs, à quel titre irait-elle chez toi ? Quand je t’avais dit qu’elle y viendrait, j’avais surmonté, pour te plaire, un grand obstacle et parlementé pendant plusieurs jours. Tu n’en as tenu compte et tu es venue, sans propos, réentamer une chose irritante, une chose qui m’est antipathique, qui m’avait demandé de la peine. C’est toi, la première, qui as rompu. Tant pis. Et puis, je t’en supplie encore une fois, ne te mêle pas de cela. Quand le temps et l’opportunité se présenteront, je saurai ce que j’aurai à faire. Je trouve ta persistance, dans cette question, étrange. Me demander toujours à connaître ma mère, à te présenter chez elle, à ce qu’elle vienne chez toi, me paraît aussi drôle que si celle-ci voulait, à son tour, que je n’allasse pas chez toi, que je cessasse de te fréquenter, parce que, parce que, etc. Et je te jure bien que si elle s’avisait, elle, d’ouvrir la bouche sur ces matières, elle ne serait pas longue à la refermer, sa bouche. Autre question, à savoir, la financière. Je ne boude pas du tout. Je ne cale pas. Je ne cache nullement mes gros sous (quand j’en ai), et il est peu de gens aussi maigrement rentés que moi, qui aient l’air si riche (j’ai l’air riche, c’est vrai) — et c’est un malheur,