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Page:Flaubert - Salammbô.djvu/297

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vent. Au milieu de l’isthme leur foule s’arrêta, les Mercenaires établis devant eux, près des murailles, ne voulant point bouger.

Puis, du côté de l’Ariane, apparurent les hommes de l’Occident, le peuple des Numides. En effet, Narr’Havas ne gouvernait que les Massyliens ; d’ailleurs, une coutume leur permettant après les revers d’abandonner leur roi, ils s’étaient rassemblés sur le Zaine, puis l’avaient franchi au premier mouvement d’Hamilcar. On vit d’abord accourir tous les chasseurs de Malethut-Baal et du Garaphos, habillés de peaux de lion, et qui conduisaient avec la hampe de leurs piques de petits chevaux maigres à longue crinière ; puis marchaient les Gétules dans des cuirasses en peau de serpent ; puis les Pharusiens, portant de hautes couronnes faites de cire et de résine : et les Caunes, les Macares, les Tillabares, chacun tenant deux javelots et un bouclier rond en cuir d’hippopotame. Ils s’arrêtèrent au bas des catacombes, dans les premières flaques de la lagune.

Mais, quand les Libyens se furent déplacés, on aperçut à l’endroit qu’ils occupaient, et comme un nuage à ras du sol, la multitude des Nègres. Il en était venu du Harousch-blanc, du Harousch-noir, du désert d’Augyle et même de la grande contrée d’Agazymba, qui est à quatre mois au sud des Garamantes, et de plus loin encore ! Malgré leurs joyaux de bois rouge, la crasse de leur peau noire les faisait ressembler à des mûres longtemps roulées dans la poussière. Ils avaient des caleçons en fils d’écorce, des tuniques d’herbes desséchées, des mufles de bêtes fauves sur la tête, et, hurlant