CATHOS, ouvrant sa lettre.
Allons, voilà la mienne ouverte, et si je ne la lis, ni ne réponds, je vous prends à témoin que c'est que je ne sais ni lire ni écrire.
MADAME LÉPINE
Garde-la ; je te la lirai.
VCATHOS
Grand merci ! il faudra bien, afin de sauver ma réputation.
MADAME LÉPINE
Eh bien, Marquise, êtes-vous contente du style du Chevalier ?
MADAME LA THIBAUDIÈRE, riant.
Il est charmant, je dis charmant ! mais bien m'en prend d'être avertie : quinze jours plus tôt, j'aurais pris cette lettre-là pour une insulte, Madame Lépine, pour une insulte ! car elle est hardie, familière. On dirait qu'il y a dix ans qu'il me connaît.
MADAME LÉPINE
Je le crois. Le Chevalier, qui sait son monde, vous traite en femme instruite.
MADAME LA THIBAUDIÈRE
Vraiment, je ne m'en plains pas ; il me fait honneur… tenez, lisez-le.
CATHOS
Je crois aussi que celle de mon galant aura bien des charmes, car il va si vite dans le propos ; il me considère si peu, que c'est un plaisir, le petit folichon qu'il est.
MADAME LÉPINE lit haut celle de la Marquise.
Êtes-vous comme moi, Marquise ? je n'ai fait que vous voir, et je me meurs ; je ne saurais plus vivre ; dites, ma reine, en quel état êtes-vous ? à peu près de même, n'est-ce pas ? je m'en doute bien ; mon cœur ne serait pas parti si vite, si le vôtre avait dû vous rester. C'est ici une affaire de sympathie ; notre étoile était de nous aimer : hâtons-nous de la remplir ; j'ai besoin de vous voir ; vous m'attendez sans doute. À quelle heure viendrai-je ? Le tendre et respectueux Chevalier de la Trigaudière.
MADAME LÉPINE, après avoir lu, et froidement.
C'est assez d'une pareille lettre, pour illustrer toute la vie d'une femme.
CATHOS
Quel trésor !
MADAME LA THIBAUDIÈRE, riant.
Que dites-vous de cette étoile qui veut que je l'aime ?
MADAME LÉPINE
Et qui ne met rien sur le compte de son mérite ! Remarquez la modestie…
MADAME LA THIBAUDIÈRE
Et cet endroit où il dit que je