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Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, I.djvu/235

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bientôt ; car, si vous ne le faites, je n’aurai pas la force de vous voir partir.

— Cher ami, ai-je besoin de vous jurer que je vous aime ? ma conduite ne vous le prouve-t-elle pas ? Quant à l’union que nous projetons Dieu seul sait l’avenir qui nous est réservé !

— Mais votre volonté, Flora ! répétez-moi que, dès ce moment, je peux vous regarder comme ma femme. Oh ! répétez-le.

J’aurais bien voulu éviter de lui renouveler une promesse que je savais bien ne pouvoir tenir ; mais sa douleur m’effraya. Je craignis qu’il ne pût la maîtriser, et, pressée par son expression déchirante, par la crainte que David ou toute autre personne entrant ne le trouvât tout en pleurs, je promis que je serais sa femme et que je resterais en Amérique à partager sa bonne ou sa mauvaise fortune. Le malheureux, ivre de joie, était trop vivement ému pour s’apercevoir de la profonde douleur qui m’accablait. Il ne sentit pas dans ses étreintes qu’il ne pressait qu’un cadavre incapable de lui rendre la moindre caresse. Il me quitta, ne se sentant pas la force de m’accompagner, et je partis avec M. David pour me rendre à bord. Je fis mes adieux à madame Aubrit et saluai la foule de